Biocarburant: la première génération en appelle une seconde. par David Lefebvre.
A peine les éthanoleries commencent-elles leur production que le bioéthanol se voit sérieusement remis en cause. Et pourtant, cette première génération de biocarburants en appelle une seconde qui repésentera un bilan environnemental autrement plus favorable.
Le bioéthanol connaît actuellement bien des remises en cause. Ainsi qu’annoncé dans l’Est agricole et viticole en janvier 2007, c’est tout d’abord son bilan environnemental qui est rediscuté. Et en particulier l’efficacité énergétique. Le bioéthanol de première génération représente 43 % de la matière sèche totale produite au champ, car il n’est effectivement élaboré qu’à partir de l’amidon. L’efficacité énergétique évaluée à ce jour ne prend en compte que 43 % des coûts énergétiques fossiles nécessaires à la production totale. Ce qui est loin d’être juste selon les opposants. Une étude devrait bientôt clarifier la question.
L’autre remise en cause est plus critique pour la nouvelle filière. Elle touche à la défiscalisation accordée par les pouvoirs publics. L’essence est taxée à 59 centimes d’euros le litre. Le bioéthanol bénéficie de 33 centimes d’euros de taxes en moins. Si bien que le prix du bioéthanol E-85 se situe aux alentours de 80 centimes du litre à la pompe. Mais comme les voitures dites flexfuel consomment 30 % de plus, c’est une opération blanche pour le consommateur.
Selon la Confédération générale des producteurs de betteraves, la loi de finances rectificative en préparation pour 2007 prévoirait une réduction de 40 % de cet avantage fiscal donné au bioéthanol. Au final, il ne serait plus compétitif, une annonce mal venue à l’heure où les céréaliers etles betteraviers disent avoir investi près d’un milliard d’euros dans les éthanoleries.
Le moteur HCCI
La solution pourrait venir des motoristes avec la technologie HCCI (Homogeneous Charge Compression Ignition). Il s’agit de nouveaux moteurs à essence, mais fonctionnant selon le principe du moteur Diesel à compression – phénomène d’auto allumage.
Ainsi, les reproches qui étaient adressés aux moteurs à explosion de ne pas donner de perspectives en matière d’amélioration de la sobriété ne sont plus fondés. Désormais, le bioéthanol pourrait offrir les mêmes améliorations de rendement que le gasoil, le diester ou l’huile végétale, dont on sait qu’elle fonctionne parfaitement bien avec des moteurs Tier 3, common rail à injection directe. Déjà, Général Motors avec la Saturn Aura et avec l’Opel Vectra a mis au point les premiers prototypes dotés du moteur HCCI, 2.2 Ecotec à 4 cylindres. Comparé à un moteur à essence classique, la consommation d’essence ou de E85 est diminuée de 15 % . Mais surtout, les perspectives d’amélioration de rendement de ces moteurs sont aussi intéressantes que le diesel.
Enfin, le bioéthanol serait accusé d’être à l’origine de la déstabilisation du cours mondial des céréales en déséquilibrant l’offre et la demande. Un argument assez discuté. L’augmentation serait en réalité liée au déficit de production mondial en 2007, en particulier en Australie, à l’augmentation du cours du pétrole et donc des coûts de production et à une augmentation de la demande tirée par les pays émergents comme la Chine.
Seconde génération
Finalement, la filière fonde beaucoup d’espoirs sur les carburants de seconde génération pour redorer son blason.
Leur élaboration consiste à tirer non seulement partie des grains, mais aussi de la partie végétale comme la paille, les celluloses, les pailles de maïs ou les pulpes de betteraves. Il est en effet possible d’opérer une conversion chimique de cette biomasse en carburant par le procédé BTL – craquage des chaînes végétales à haute température et formation de gazole de synthèse. Il existe également une méthode de conversion biologique, moins énergivore, puisqu’elle s’opère à des températures biologiques. Les micro-organismes transforment la cellulose en carburant. On tire beaucoup plus d’énergie au final avec les mêmes coûts énergétiques fossiles que ceux nécessaires à la production des carburants de première génération. D’où des efficacités énergétiques grandement améliorées.
Des usines polyvalentes
En outre ces usines de conversion des celluloses en carburant seraient polyvalentes en étant capables de convertir des celluloses ou des lignines d’autres filières : bois, papier, déchets verts…L’usage ainsi optimisé des usines améliore le bilan carbone de la filière. Actuellement, un pilote existe en Suède dédié à la conversion du bois en carburant. Deux autres pilotes pourraient voir le jour en France. Pour avoir une seconde génération de carburant, il aura fallu aider la première. Les producteurs céréaliers et betteraviers espèrent des pouvoirs publics qu’ils soutiennent les biocarburants car les perspectives techniques sont réelles.
D.L.
En savoir plus :
– Les biocarburants de deuxième génération en .pdf
– Les biocarburants du futur de 2ième et 3ieme génération
– Les carburants de deuxième génération, liquéfaction de la biomasse BTL par le CEA
– Ecobilan de l’éthanol, l’étude Price WaterHouse Coopers remise en cause
– Forum E85 et biocarburant