par Did67 » 17/07/18, 10:17
Vidéos MSV de la conférence de Sélosse - petit avis complémentaire
J'ai été au bout des vidéos.
Et mon enthousiasme de départ s'est étiolé comme feuilles à l'automne...
J'ai trouvé qu'il a bien posé les fondamentaux : enthousiasme. Aucune discussion. C'est maitrisé.
Et puis il n'a pas décollé de sa posture de scientifique de "labo", avec ses petits chichis, enfilant les perles, tel cas botanique curieux puis telle excentricité forestière : cela allait toujours dans le même. Mais on n'a pas besoin de 6 h pour admettre (ou pas) que les mycorhizes existent.
Plus personne ne doute que les mycorhizes existent et qu'elles sont efficaces.
Et ensuite ???? Plus rien. Des redondances. Des impros. Des questions sans réponses. Des promesses non tenues (peut-être pas filmées) : "il faut qu'on reparle du bio"... Je n'ai rien vu. Je me doute de ce qu'il allait dire.
Son schéma sur le fait que telle plante peut "perdre" dans les échanges mycorhiziens avec tel champignon spécifique est intéressant. Et dois nous inciter à la prudence. Une symbiose n'est pas nécessairement bénéfique à l'une des parties. L'autre peut tirer les marrons du feu. Il y a des mariages déséquilibrés. Mais cela ne dit rien en pratique : Sélosse indique lui-même que les plantes collaborent avec des dizaines, des centaines d'espèces de champignons. Dès lors, qui dit que la plante va, dans le joyeux bordel du vivant, s'engager avec ce champignon là ? Qui dit qu'il n'y aura pas divorce ??? Que nous dit ce "mariage forcé" ??? Sans doute que pour cette espèce de plantes, ce n'est pas le bon partenaire...
[Mais effectivement, en haut, lorsque je ne sais plus qui a évoqué ça, j'ai répondu "à coté" !!! Je ne savais qu'il était question d'un champignons mycorhizien spécifique et je parle "des mycorhizes" en général, en symbiose avec une plante dans le joyeux bordel vivant... Je ne peux le démontrer scientifiquement, mais j'ai l'intuition que la plante s'y retrouve - pas nécessairement en termes de "biomasse produite", qui était le seul critère retenu ; il y a d'autres aspects : protection phytosanitaire, communications entre sujets de la même espèce ,ou, chez les orchidées, déclenchement de la germination des graines... Quand l'évolution conduit à un système où, selon les critères des hommes, ce n'est pas raisonnable, c'est les critères de l'homme qui ne sont pas bons. Personne, chez Airbus, n'aurait inventé un machin volant aussi grossier que le bourdon ! Et c'est cette maladresse vibrante qui fait tomber le pollen chez certains plantes et féconde bien mieux que les abeilles - par ex chez la tomate !!]
J'ai été stupéfait qu'il ne puisse indiquer des seuils pour les phosphates. Il semble ignorer ou préfèrent ignorer (compétition de chercheurs ??? snobisme des checheurs "purs" contre les "agronomes de terrain" ???) les travaux en conditions pratiques de Fortin. Page 91 de leur livre (que du coup je recommande, sans pub !) il ya un tableau qui donne pour 9 espèces maraichères ou agricoles, la "dépendance mycorhizienne des plantes" = la part de P qui leur est fourni par les mycorhizes pour une teneur de 100 ppm de P dans le sol. On voit que chez le blé, à cette teneur, il est "indépendant". Mais à 50 ppm, il reçoit 30 % de son P des mycorhizes. Le poireau, à 100 ppm de P, en reçoit 95,7 % des mycorhizes. A 50 ppm, c'est 97 %. Mais à 150 ppm, cela a tombe à 50. Plusieurs légumes sont dans des ordres de grandeur voisins : carottes, pois, haricot, fève, mäis doux. Tomate et pomme de terre sont moins dépendants [40 à 60 % à 100 ppm ; légèrement plus à 50 ppm - 60 / 65 %] et deviennent "indépendants" à 150 ppm [0 % de P d'origine mycorhizienne].
Le commentaire dit que cela a été obtenu "d'une expérience au champ".
Voilà ce qu'il fallait répondre au jeune homme qui l'interrogeait. Et non pas "on ne sait pas précisément" ! Et se taire. Il y a clairement, pour les légumes, un seuil, entre 100 et 150 ppm de P dans le sol, à partir duquel le bénéfice des mycorhizes diminue ou s'effondre. Sur cette base, je recommande de ne pas fertiliser, au risque de rendre la plante "indépendante" - puisqu'elle trouve facilement ce qu'il lui faut - des champignons mycorhiziens. Le champignon mycorhizien devient alors un parasite, du point de vue du légume - "qui a tout ce qu'il lui faut". Pourquoi le nourrirait-il ??? Car ce champignons lui coûte (je n'ai pas noté les chiffres de Sélosse : jusqu'à 40 % des produits de sa photosynthèse ; je dis souvent 20 / 25 % - je ne sais pas si je me trompe). C'est alors le jardinier qui devient dépendant, car il a pris en charge, à ses dépens, ce que le système vivant faisait [pour la même raison, je déconseille d'arroser tant que la RU du sol tient et tant que les légumes ne montrent pas de signes manifestes de flétrissement. Et surtout pas à la plantation. Mais je fais de l'agronomie de néandertalien ! Pas de la "recherche" publiable dans "Nature" ou "Science" - je parle des revues prestigieuses]
Il est clair qu'un agronome avance même sur des connaissances fragiles. Ou parfois sans, à partir de ce qu'il imagine comprendre du système vivant ! Au risque de se planter. Mais si les néandertaliens avaient attendus de tout comprendre avant d'inventer une agriculture très très approximative, on ne serait pas là ! Je suis un néandertalien !!!
Bien sûr, ce n'est qu'un avis. Le mien.
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