Je rappelle cette version simple, trop simple. Et par conséquent simpliste. Mais qui tient en quelques lignes. Donc qui plait. D'autant plus que
"idéals", cela fait rêver !
J'avais promis des précisions. Les voilà.
a) L'INRA travaille depuis bien une dizaine d'années (à Rennes, Dijon ou Grignon) sur ce qui s'appelle la "biofumigation", qui consiste à utiliser des moutardes
sauvages, des radis fourragers ou des navets entre les cultures de légumes ou en engrais verts.
b) Il est avéré que ces plantes émettent des molécules appelées des glucosinolates, qui ont une activité antigerminative pour les spores de champignons.
c) L’efficacité (
relative : comme toujours en lutte "bio", on n'élimine pas, on régule !) est prouvée dans le cas de la lutte contre le Rhizoctonia de la betterave (un parasite des racines de betteraves) : le nombre de racines attaquées est réduit de 40 à 50 % et les surfaces nécrosées (abimées) des racines de 20 à 25 % si on enterre superficiellement les crucifères.
d) L’efficacité dépend de différents facteurs, non encore tous maîtrisés. Notamment du fait si on broie et enterre ou pas...
e) Enfin et surtout, ces glucosinolates peuvent détruire les champignons mycorhiziens et certaines bactéries, utiles.
f) Les chercheurs craignent aussi que les champignons pathogènes (responsables des maladies) ne développent, face à un usage répété et généralise, une résistance à ces molécules naturelles. Je ne cesse de répéter que rien n'est jamais tout beau ou tout mauvais... Comme je ne cesse de répéter que ce n'est pas parce qu'une molécule est naturelle qu'elle échappe aux défauts qu'on met en général sur le dos des molécules "de synthèse" (ici, la possible apparition d'une résistance - c'est pourtant un principe fondamental du vivant qu'une espèce attaquée, ici le champignon par le glucosinolate des crucifères, se défend en essayant de contourner cette agression ; pourquoi les "bio" préfèrent-ils souvent croire à des solutions miraculeuses - puisque naturelles - plutôt que de comprendre le vivant ?????).
On voit donc que si on la développe, la réalité est bien moins "miraculeuse" ou "parfaite", qu'elle est beaucoup plus incertaine et hasardeuse. Ces développements intéressent peu de monde. Chacun préfère une solution miraculeuse et simple. "Bla bla" me répètent les critiques les plus sévères quand je prends le temps d'expliquer ! Ils exigeaient une solution simple !
Cela ne veut absolument pas dire qu'il ne faut pas utiliser ces techniques : il faut, en revanche, cesser de rêver que cela agira comme les produits de synthèse, qui, à l'échelle du vivant, sont des bombes atomiques, avec des effets rapides, souvent totaux (au moins à court terme). Et cesser de penser que c'est sans inconvénient car naturel ! Le passage au "bio" ne peut se concevoir comme un simple remplacement d'un produit de synthèse par un produit naturel (ou ici, une culture). C'est tout un système qu'il faut changer. Je m'interroge quant à l'usage des crucifères en engrais verts (ce que je fais actuellement, cette année encore), sans les broyer ni les incorporer : quel effet sur mes champignons mycorhiziens ???? Négligeable ??? Ou faible ??? Je l'espère...
Le meilleur et plus sûr moyen de lutter contre de tels parasites spécifiques (propres à une espèce ou une famille) reste la rotation longue (environ 5 ans). Les recherches citées se situent dans des cadres plus intensifs, avec une seule espèce par parcelle et des rotations rapides (parfois à 3 ans, dans des systèmes
très simplifiés pour des
raisons économiques - filières de vente, machinisme spécifique). La bonne agronomie est oubliée en route. Alors on cherche des "produits" ou autres solutions simples...