Lombric26 a écrit :
En fait si j’ai bien compris le besoin en azote se détermine toujours par rapport au carbone et non par rapport au poids total de la matière avec son c/n. C’est comme ça qu’on arrive à 1000 kg d’azote . Un calcul de pourcentages en bref .
Je ne le dirais pas comme ça.
La "faim d'azote", Mulet n'est pas parfaitement clair là-dessus, c'est assez précis : c'est la "disparition" d'une partie de l'N non pas du sol, mais du "compartiment" dans lequel le trouvent les plantes : l'azote minéral sous forme dissoute dans la solution du sol.
C'est très précisément ça. Cet azote ne "disparait" pas du tout du sol. Il ne s'évapore pas. Il change de compartiment : il devient azote organique "incorporé" dans la matière organique (soit vivante : les protéines, etc des organismes vivants : bactéries, champignons, vers de terre et autres ; soit morte : substances humiques). Du coup, il est "planqué". Des lessivages. Mais aussi au nez et à la barbe des légumes qu'on veut cultiver. Qui font la gueule - comme le montre très bien les pots de choux rouges (même si c'est très artificiel !).
Donc que se passe-t-il quand tu apportes une MO à C/N élevé ???
Il y a de l'énergie (qu'on ramène au C, mais qui très exactement est dans la liaison -C-C- ou -C-H des molécules organiques - même dans le pétrole ou le méthane !) ; dès qu'il y a de l'énergie, les organismes vivants sont mieux nourris, deviennent plus actifs, se multiplient...
Les courbes traduisent bien cette "accélération" de la vie.
Pour se multiplier, les organismes, dont la recette est universelle, et qui ont un C/N voisin de 8 (je crois que Mulet dit 10 ; les ordres de grandeur sont bons), vont désespérément chercher de l'azote comme un gamin cherche la viande dans le spaghetti bolognaise.
La "chance" des organismes du sol (bactéries, les plus rapides au début, champignons ensuite), c'est qu'ils se trouvent partout dans le sol, à très haute densité. Donc ils ne "s'emmerdent" pas : ils prennent autour d'eaux, l'azote minéral qui est dans le sol.
Les voilà blindés.
b) Mais c'est plus compliqué. ET ça, Mulet, dans cette vidéo, passe à coté...
Donc dans la première phase, cette vie explose, et immobilise PLUS d'azote que ce qui est indiqué dans le calcul .
c) Ensuite, au fur et à mesure où l'énergie diminue, ces organismes commencent à... mourir !!!
Ils sont décomposés. Servent de nourriture à d'autres...
S'installe le processus qui conduit à la formation de substances humiques.
A courte terme, le drame des substances humiques est que leur C/N est d'neviron 15 (pour les substances humiques fraiches, après quelques mois / 18 en ordre de grandeur ; il descend à 10/12 pour les très vieilles substances humiques). C'est la recette en quelque sorte de la fabrication des substances humiques.
Et c'est là qu'intervient donc le calcul, qui n'est que le bilan au bout du processus (environ 18 mois) :
- ma MO fraiche de départ avait un C/N de 50
- la moitié du C est parti en "fumée" (CO² très exactement) ; elle a servi de "carburant" au vivant ; on n'en parle plus ; cela a été cramé...
- l'autre moitié (dans le cas du BRF, dont 50 % de la matière sèche environ se transforme en substances humiques - ce qu'on désigne par le coeff K1), renfermera donc 1 g d'N pour 15 g de C (ce n'est pas les atomes qui sont comptés, mais les masses - petite erreur, minime, dans ce que dit Mulet)
- et donc on aura 1,7 t d'N pour 100 t de BRF immobilisés ; le BRF de départ, y compris celui qui aura été cramé en "CO²", contenait 600 kg
- et donc le système "sol-plantes-organimes vivants" aura dû trouver, au bilan final, environ 1 t d'N pour 100 t de BRF. Au-delà de ce qui transitoirement, sera passé par les organismes vivants et leurs cycles de vie/mort ! ET au-delà de ce qui était présent.
Conclusion :
a) dans les semaines qui auront suivi la mise ne place de ce BRF, il y aura eu une "faim d'azote" supérieur à ce bilan final (tout ce que la multiplication rapide des bactéries va immobiliser - puis restituer en suite, quelques mois plus tard quand elles meurent !)
b) et en fait, là Mulet a raison, le vivant a des mécanismes compensatoires, car sinon cette tonne manquerait à jamais, et la faim d'azote serait durable : la fixation libre, la minéralisation dite secondaire des "vieilles matières organiques" (le bon vieux stock de MO hérité de nos aïeux, même dans un sol maltraité), les "restitutions" des plantes (on ne récolte qu'une partie - parfois une petite partie ! - des légumes) qui sont des matières fraiches qui vont assez vite se minéraliser plus au moins...
Donc assez rapidement, de très nombreux cycles vont se croiser. Nous voilà dans le "joyeux bordel d'un sol vivant", file moi de l'azote je te le rendrai, tiens t'en as trop je te le pique, crève salope que je te bouffe, etc... tout ça en même temps.
c) là où il se trompe : une forêt est un système extrêmement pauvre en azote ; il n'y en quasiment pas dans le bois ; l'arbre recycle le peu d'azote qu'il a fini par trouver dans sa partie vivante, extérieure, l'aubier ; les champignons recyclent le leur en vivant/mourant ; et cette pauvreté en azote va de paire avec une relative pauvreté en bactéries, pas de nitrates (il n'y a pas de lessivages sous une forêt !) ; ce qui "démontre" l’exacte contraire de ce qu'il affirme : il y a du carbone en masse, mais pas d'azote qui est pissé du tout !!! Enfin, très exactement très peu.
Je ne les ai pas sous la main, mais faites une recherche sur les analyses des teneurs en azote des sols forestiers pour vérifier cela. Vous serez édifiés.