VetusLignum a écrit :
Est-ce que vous pouvez faire mieux que les sélectionneurs professionnels ? Cela ne me surprendrait pas, car ceux-ci ne tiennent pas compte des spécificités de votre environnement et de ses champignons mycorhiziens.
Je pense qu'il ne faut pas confondre deux choses : le "cahier des charges" et les lois de la génétique
a) le "cahier des charges" d'un programme de sélection, c'est ce qu'on "regarde" (mesure, note, évalue). Jusque là, cela a surtout été des critères de présentation (forme, couleur), de culture (productivité, résistance ou tolérances à certains parasites) résistance aux transports / chambres froides (dont le gène "longlife")... C'était demandé par les producteurs (qui sont les acheteurs des nouvelles variétés ; les graines "amateurs" ne sont qu'un sous-produit et une niche).
b) n'importe quel sélectionneur peut te sélectionner, en une dizaine d'années, ce que tu veux, à condition que tu payes ! Tu veux une tomate plus résistante à la sécheresse ? la faculté de mycorhizer ? etc ??? Pas de problème. Il faut payer le programme de recherche. Qui paye pour les mycorhizes ? Personne pour l'instant.
c) en revanche, il ne peut pas faire de miracles. Pour ça, c'est Lourdes. Donc si tu
multiplies les critères, cela n'ira pas. Excellent goût comme la coeur de bouef, résistance au Meloidogyne comme un porte-greffe, résistance au mildiou, la productivité de la Corazon, belle couleur rouge "commerciale", arôme (quand tu la sens au nez), etc... Si tu allonges la liste des critères, là, il va t’envoyer bouler, car tout simplement réunir tous ces gènes et stabiliser la variété, c'est mission impossible. Non qu'il soit mauvais. Simple question de probabilité. Gagner à l'Euroloto avec 150 boules, et 6 lettres dans le bon ordre : une chance sur des milliards... La loterie du vivant sort gagnante à tous les coups. Enfin sauf 1 fois sur des milliards...
L'hybridation a permis une avancée, en croisant deux lignées de sorte que la descendance ait forcément les deux gènes (mais il y a tout un tas de restrictions : dominance des gènes en question, etc...). Donc en pratique ce n'est pas aussi simple. Aucun sélectionneur n'a encore, à ma connaissance réussi à "intégrer" tous les gènes de résistance au mildiou dans une seule variété. Quand l'un y est, l'autre s'est barré... Il faudrait faire... des OGM. Mais là, commercialement, c'est mort !
D'où l'élégance consistant, à mon avis, à se dire, puisque la tomate se greffe bien : je vais diviser le problème en deux. Et diviser le ombre de critères par deux, c'est rendre le problème des milliers de fois plus simple (en probabilité, le nombre de facteurs se traduit, si ma mémoire est bonne, en une multiplication factorielle du nombre de possibilités). Un porte-greffe vigoureux et résistant au Meloidogyne. Il produira des fruits ridicules et parfaitement dégueulasses. Mais je m'en fous. Et là, 3 ou 4 critères, recherche des gènes sauvages dans des banques de gènes, tu mélanges, tu hybrides, tu tries... Succès presque garanti.
Et d'un autre coté, tu continues d'améliorer par exemple l'antique Coeur de boeuf, pour lui donner un petit coup de résistance au mildiou qui lui manque... Là encore, pas facile, mais pourquoi pas ???
Et tu greffes.
Pour comprendre : 4! (factorielle 4) = 24 mais factorielle 8 = 40 320
Il est donc infiniment plus simple de sélectionner deux lignées sur la base de 4 critères, avec 24 + 24 possibilités plutôt qu'une seule lignée-miracle avec les 8 critères à réunir, sur la base de 40 320. 48 et 40 320, c'est pas pareil !
C'est très simplifié, mais cela situe la différence, en ordre de grandeur, du "travail" entre "avoir la chance d'avoir deux fois les 4 facteurs qu'on veut dans un même lot", comparé à en avoir les 8.
Voilà pourquoi je ne vais pas jouer au sélectionneur du quasi-impossible !
Au moins sur des critères tels que résistances aux maladies, c'est leur obsession depuis des années. Et si l'un d'entre eux avaient réussi à tout mettre dans la même variété, cela aurait le jack-pot ! Même si quelques variétés ont plusieurs gènes de résistance aux mildious (vite contournées par l'évolution du parasite, en 3 ou 4 années, car il n'y a que 2 ou 3 gènes ; le mildiou "craque" cette clef très vite).