izentrop a écrit :"Dans le contexte actuel de délabrement de nos terres agricoles, afin de restaurer la teneur en
humus, la totalité de la biomasse végétale animale et humaine doivent être mobilisées pour
entrer dans des filières de compostage aérobie. Dans des conditions anaérobies, la formation
de l'humus ne démarre pas. La valeur biologique de la matière première végétale ou animale
de l'humus potentiel (qui à la limite pourrait être évaluée en termes monétaires aussi) est donc
plus élevée que celle de très peu d'énergie produite au départ de la même quantité de
matières par biométhanisation."
C'est ce qu'écrivait Joseph Országh.
Il se trompe ? Est-ce le seul à affirmer ça ?
http://www.eautarcie.org/doc/article-bi ... mus-fr.pdf
A mon avis, dans le cas général, il se trompe ! Il devrait approfondir la question de l'humification et de la méthanisation. Mais je ne connais pas cette personne et ses compétences. Ce que je sais, c'est que ce n'est pas parce que quelque chose est répété sur internet que c'est vrai ! (ni faux d'ailleurs !).
- l'humus se produit essentiellement à partir de la transformation de la lignine (un peu de la cellulose) ;
- les biomasses fermentescibles (celles qui vont donner du méthane + chaleur en milieu anaérobie ou du CO² + chaleur en milieu aérobie) ne donneront pas d'humus...
Il faudrait, sur cette question d'humus, éclaircir aussi :
- le "vrai" humus est constitué d'acides humiques / acides fulviques, qui sont des composés brins / noirs du sol ; il est stable ; il contribue à plein de qualités du sol (rétention d'eau ; rétention des éléments nutritifs - cations ;stabilité de la structure ; stabilisation des argiles...) ; je ne parle que de ça quand j'écris "humus"...
- est souvent appelé aussi "humus" les matières organiques en décomposition plus ou moins avancée ; une sort de "terreau" ; qui n'est que très très partiellement du "vrai humus"
- cette double acception du mot est vieille comme la pédologie et crée une énorme confusion, notamment sur internet parmi les gens qui n'ont pas les bases et parmi les "croyants"...
- la lignine n'est pas digérée dans le méthaniseur ; seule la cellulose l'est ; lorsqu'il y en a à l'entrée du digesteur (ce que l'exploitant évitera, car cela "encombre" son système pour rien) elle se retrouve donc dans le digestat, qui est épandu dans les champs...
- donc la biomasse fraiche (qui constitue une bonne part de nos déchets) est avant tout de l'énergie (à travers les atomes de C et de H liés), un peu de minéraux...
- méthaniser revient à introduire un maillon dans le cycle naturel de décomposition, pour extraire l'énergie contenue dans les molécules hydrocarbonées ; pour le reste, le digestat renfermera tout ce que cette biomasse aurait donnée au sol lors de sa décomposition aérobie (qui aurait conduit à dissiper l'énergie sous forme de chaleur, le C sous forme de CO et l'H sous forme d'eau)...
Maintenant nuançons un peu quand même :
- il est exact qu'on enlève le "nourriture
énergétique" de la bouche des organismes vivants du sol [à qui il en reste ; racines, leurs collègues décédés, etc...] mais moins ; le digestat stimule donc moisn la vie du sol que ne le ferait l'épandage de la biomasse...
- dans certains cas de projets un peu discutables (basés sur la récolte intégrale des cannes et feuilles de maïs en vue de leur méthanisation), la question de le restitution de l'humus peut se discuter (même si comme dit, la partie humifiable revient au sol via le digestat) ; ce n'est de loin pas la majorité des situations
- il faut aussi mettre dans la balance le bilan en terme de "gaz à effet de serre" émis par les tas de fumier / les cuves à lisier / les biomasses en décomposition lorsqu'il n'y a pas de méthanistaion : une catastrophe !
- et enfin, il faut savoir qu'en agriculture (j'ai quitté le jardinage), un bilan humique s'équilibre sur un cycle de cultures avec restitution d'une partie de la biomasse produite seulement ; nul besoin de tout restituer... Il nosu faudrait là rentrer dans des détails de calcul...
- ce n'est pas parce que le stock d'humus (le vrai) a été saccagé en 50 ans environ d'agriculture intensive (enfin, en moyenne, il a été
divisé par 2 ; il ne faut pas non plus exagérément exagéré) qu'il faut penser à le reconstruire en très peu de temps, de façon un peu autiste ; il y aura à arbitrer entre les différents usages de la biomasse et les exigences des uns et des autres...
Donc je pense que l'extrait mis en citation est une vision très étroite des choses, partiellement erronée.
Après, c'est un avis.
La réalité agronomique du sol est déjà fort complexe. Si on rajoute les questions de GES et d'énergie, cela devient très très complexe. Donc émettre un avis revient souvent à mettre le projecteur sur un aspect parmi cent, au détriment des autres.
J'ai tendance à être pour des solutions "pondérées", non "spectaculaires" et "non-extrémistes"...
Donc ce n'est que mon avis.