Le permis de construire a été signé lundi soir à Weinbourg : d'ici au mois de septembre, cinq hangars de 360 mètres de long et 22 de large abriteront une unité de fabrication de pellets à partir de biomasse et supporteront 35 000 m² de panneaux photovoltaïques, de quoi alimenter en électricité la ville voisine d'Ingwiller.
Quand Jean-Luc Westphal a envoyé en juillet dernier sa lettre de demande de raccordement à l'Électricité de Strasbourg pour son projet photovoltaïque d'une puissance de 4,5 mégawatt, l'ÉS a rappelé dès réception du courrier pour « rectifier l'erreur. Car vous vouliez sans doute écrire 4,5 kilowatt, n'est-ce pas ? »
Et bien non, il n'y a avait pas eu de confusion : le projet sur le point de se réaliser au pied des Vosges du Nord, entre Weinbourg et la zone industrielle d'Ingwiller, porte bien sur une production d'électricité photovoltaïque qui se mesure en MW.
Il prévoit 35 000 m² de panneaux de silicium en toiture ce qui en ferait la plus grande installation photovoltaïque intégrée de France voire d'Europe [actuellement, la plus grande surface intégrée de France métropolitaine se situerait sur la toiture du stade de football Geoffroy-Guichard à Saint-Etienne avec 2 600 m²].
Au départ de ce pari fou, un projet typiquement agricole. Jean-Luc Westphal qui gère avec son frère Daniel une exploitation essentiellement céréalière de 200 ha voulait se diversifier et produire une énergie à partir de son activité.
Valoriser les résidus de récolte et déchets de coupe
Passionné d'énergies renouvelables (les frères Westphal avaient été les premiers en 2003 à mettre en place une chaudière à céréales), l'agriculteur-entrepreneur a imaginé de compacter la canne de maïs et la paille de blé, ainsi que les déchets de bois forestier des exploitations alentours.
Cette biomasse transformée en pellets et briquettes, sera ensuite vendue comme combustible « pour un rendement énergétique bien supérieur au bois ». Il entend également développer des cultures réputées pour être énergétiques : le miscanthus par exemple, également appelé herbe à éléphant, venu d'Asie, de culture simple et au rendement de 15 t par hectare (contre six pour la paille de céréale) ou encore le saule, bois de courte rotation (12 t/ha).
Dans l'esprit de Jean-Luc Westphal, cette biomasse remplacera avantageusement le fioul : « Une fois transformés, 2,2 kg de paille de blé équivaut à un litre de fioul, pour moitié moins cher ». Mais la transformation à moindre coût suppose un séchage naturel et donc des capacités de stockage importantes, à l'abri des intempéries.
« C'est là que le projet s'est combiné avec le photovoltaïque, explique l'agriculteur. Puisque je devais construire de très grands halls de stockage, autant les orienter au sud et y prévoir des panneaux de silicium en toiture ».
L'investissement amorti sur onze ans
D'un investissement initial de 2 millions d'euros, le projet est soudainement passé à 22 millions, le surcoût correspondant aux 35 000 m² de cellules photovoltaïques pour une unité de production électrique d'une puissance de 4,5 MW. Avec le prix de rachat imposé pour le photovoltaïque intégré, le retour sur investissement est attendu onze ans après le début de la production.
Son dossier sous le bras, Jean-Luc Westphal s'est lancé dans un véritable marathon, notamment auprès des administrations pour réaliser son entreprise. « Fallait voir la tête des gens quand ils prenaient la mesure du projet, rapporte Pierre Froeliger qui en tant qu'avocat a assisté son ami dans toutes les démarches, demandes d'autorisation, déclaration d'exploitation, demandes de raccordement, négociation de fournitures, etc. On peut dire qu'on a essuyé des plâtres partout mais on s'est accroché ».
Sauf auprès de la banque rapidement séduite, il a fallu convaincre encore et encore qu'un tel projet, innovant mais conçu sans cabinet d'études et porté par un actionnaire unique, était viable.
Finalement, toutes les autorisations ont été obtenues ou sont en passe d'être notifiées et le permis de construire a été signé lundi soir par le maire de Weinbourg. Les cinq bâtiments sortiront bientôt de terre sur les terrains de la SAS Hanau-Energie et d'ici septembre, la nouvelle unité devrait démarrer sa double production avec au minimum cinq emplois directs à la clé.
Simone Wehrung
http://www.dna.fr/local/region/20080123_DNA008813.html