par lau » 13/06/06, 16:57
L'huile végétale fait tache dans les bennes à ordure:
par Laure ESPIEUQUOTIDIEN
mercredi 07 juin 2006
Bordeaux de notre correspondante
«Je croyais qu'on avait aboli les privilèges en France en 1789. On est en train de les réinstitutionnaliser en faveur des industriels.» A la sortie du tribunal administratif de Bordeaux, hier, Alain Juste a la mine grave. Président de l'Institut national des huiles végétales pures (INHVP), basé à Agen (Lot-et-Garonne), il est l'un des pionniers du carburant propre. Pourtant, après une heure d'audience, son combat a pris du plomb dans l'aile. Il pourrait même être sérieusement remis en question pour quelques pinaillages juridiques qui masquent mal une affaire de gros sous.
Première. En cause, une délibération de la communauté de communes du Villeneuvois (CCV) d'octobre dernier. Pour la première fois en France, ce groupement de dix communes rurales, présidé par le maire (PS) de Villeneuve-sur-Lot, Jérôme Cahuzac, décidait de faire rouler ses camions poubelle à l'huile végétale pure. Mais l'initiative n'a pas plu au préfet du Lot-et-Garonne. En février, il déférait la collectivité devant le tribunal administratif. Motif : «La réglementation nationale interdit l'utilisation des huiles végétales pures à la carburation en dehors du monde agricole» (article 265 ter du code des douanes). A l'audience, la CCV espérait pouvoir s'appuyer sur une directive de l'Union européenne qui autorise et encourage ces pratiques. Mais le commissaire du gouvernement n'a pas semblé lui donner raison. Il a requis, hier, l'annulation de la délibération. Une prise de position de très mauvais augure pour le jugement, qui sera rendu dans trois semaines.
Ce qui passe surtout très mal, c'est la visite, jeudi dans la Marne, de François Loos, ministre délégué à l'Industrie. L'objectif de ce déplacement était de donner, en grande pompe, le feu vert à la première expérimentation de bioéthanol. Les biocarburants ne seraient donc pas tous logés à la même enseigne ? Pas besoin de chercher bien loin pour comprendre. «Deux types de carburants propres sont autorisés en France, rappelle Alain Juste. Il s'agit des éthers de méthyle (dérivés huilés) et des éthanols. Tous deux uniquement produits par les industriels.» Alors forcément, les huiles végétales pures pressées à la campagne, directement par l'agriculteur à côté de son champ de tournesol, ne font pas le poids. Et qu'importe si, depuis quatre ans déjà, l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) et la Diren (Direction régionale de l'environnement) leur reconnaissent un meilleur bilan environnemental et énergétique que toutes les autres. «C'est une bataille de fric, s'insurge Alain Juste. Il y a des carburants autorisés par l'Etat en accord avec les lobbies pétroliers, et d'autres interdits parce que les industriels n'y trouvent pas leur compte», résume Olivier Dourte, directeur de cabinet de la communauté de communes.
Jachère. Rien qu'en Lot-et-Garonne, 26 000 hectares sont en jachère et pourraient être valorisés par la production d'huile végétale pure. C'est l'une des rares occasions d'offrir un revenu complémentaire aux ruraux, et d'éviter par conséquent la désertification des campagnes. Par ailleurs, le tournesol pousse sans engrais et consomme peu d'eau, alors que le bioéthanol, fabriqué par les industriels sucriers (comme celui utilisé dans la Marne), est aujourd'hui le carburant qui consomme le plus d'énergie fossile pour sa production. «Nous continuerons, et épuiserons toutes les voies de recours si la décision est négative», affirme le représentant de la CCV. En plus des dix bennes communautaires 100 % écolos, le maire de Villeneuve-sur-Lot a aussi décidé de faire rouler les véhicules municipaux à l'huile végétale. Ils sont actuellement en cours de rodage.
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Le nombre de molécules contenues dans une goutte d'eau est égal au nombre de goutte d'eau que contient la mer noire!