Aujourd'hui, grâce à une technique toute simple, on peut recueillir l'eau contenue dans le brouillard et fournir aux villageois deux ou trois fois plus d'eau qu'ils n'en utilisaient auparavant et ce, à meilleur marché. L'épais brouillard (camanchaca), qui s'étend presque en permanence le long de la côte du Chili et crée des nappes de brumes tenaces quand les vents dominants soufflent de la mer et franchissent les montagnes, rend possible le recours à cette technique.
http://archive.idrc.ca/nayudamma/fogcatc_72f.html
Capteurs de brouillard
Introduction
Incidences
Préalables
Utilisateurs éventuels
Points de contact
Ressources
Introduction
À Chungungo, au Chili, petit village situé dans une des régions les plus arides du monde, l'eau est une denrée précieuse. Transportée par camion en provenance de puits éloignés, il a longtemps été normal de l'utiliser au compte-gouttes. D'un coût très élevé, l'eau, souvent contaminée, était responsable des piètres conditions hygiéniques, de la prolifération de maladies et de l'insuffisance de la production alimentaire.
(...)
Avec l'aide financière du CRDI, des scientifiques chiliens et canadiens ont mis au point un système d'approvisionnement en eau peu coûteux et durable : un filet en polypropylène tendu entre deux poteaux, un peu comme sur un gigantesque terrain de volley-ball. Des gouttelettes d'eau se forment sur les mailles du filet traversées par le brouillard. Elles tombent ensuite dans des gouttières qui alimentent un réservoir et un réseau de canalisations à Chungungo.
Chungungo est présentement approvisionné par 80 capteurs qui produisent en moyenne 10 000 litres d'eau par jour. Entre-temps, les chercheurs ont mis au point et testé un nouveau prototype de capteur facile à construire et à entretenir. Vingt capteurs fondés sur le nouveau concept ont été installés sur un nouveau site en 1992.
La réussite du projet de Chungungo a suscité l'intérêt de plusieurs autres pays pour cette nouvelle technique. On a installé des capteurs de brouillard dans la province d'Islay et dans les collines de Manchay, sur la côte du Pérou, en collaboration avec l'Instituto Nacional de Investigación Agraria y Agro-Industrial du ministère de l'Agriculture et l'Asociación TECNIDES. En Équateur, des systèmes sont en service à Pululahua et à Pachamama Grande. Des essais en cours dans certaines régions en Namibie et en Afrique du Sud visent à déterminer si ces capteurs peuvent y être utilisés.
Incidences
* L'eau tirée du brouillard a remplacé complètement l'eau auparavant transportée par camion à Chungungo. Depuis l'installation des capteurs de brouillard en 1992, la disponibilité de l'eau a dépassé les espérances. La population s'attendait à ce que la nouvelle technique lui permette d'augmenter sa consommation pour la porter d'une quinzaine de litres par personne par jour à 27 litres. Chacun consomme maintenant quelque 33 litres par jour en moyenne et il y a suffisamment d'eau pour cultiver des légumes pour la consommation locale et la vente. Cette technique a amélioré l'état de santé et haussé le niveau de revenu de la population. (En guise de comparaison, les Canadiens consomment en moyenne 340 litres d'eau par jour.)
* Les capteurs de brouillard assurent un approvisionnement en eau plus fiable et sans danger. Par le passé, les camions-citernes tombaient parfois en panne ou étaient retardés si la route en direction de Chungungo était impraticable. Les mêmes camions servaient aussi à transporter d'autres liquides qui pouvaient laisser des résidus dans le réservoir et contaminer l'eau livrée au village.
* La qualité de l'eau à Chungungo satisfait maintenant à tous les critères du gouvernement chilien et de l'Organisation mondiale de la santé. La population locale affirme que l'eau a meilleure apparence et bien meilleur goût.
* Aujourd'hui, le réseau d'adduction d'eau de Chungungo est administré entièrement par la collectivité. Les tarifs imposés aux consommateurs permettent au réseau d'autofinancer son exploitation et son entretien. Le ministère des Travaux publics du Chili assume la responsabilité du système, auquel il assure l'appui d'institutions et les investissements nécessaires à l'expansion et aux améliorations à venir.
* Auparavant pauvre, le village tire maintenant d'autres retombées du système. L'électricité y a été installée en 1993 et on a construit des maisons autour d'un nouveau secteur touristique appelé Villa Canadá. Chungungo attire aussi des vacanciers, preuve incontestable de l'amélioration de la qualité de vie au village.
* Deux cours d'une durée de dix jours organisés à Chungungo ont permis à des participants du Pérou, de l'Équateur, de la Namibie et du Chili d'acquérir une formation pratique portant sur le choix d'un site, la construction, l'exploitation et les aspects économiques de la technique des capteurs de brouillard. En 1994, le CRDI a aussi parrainé la tenue à Serena, au Chili, d'un atelier international de promotion de la technologie auquel ont participé les représentants de dix pays intéressés.
* La réussite de Chungungo a incité d'autres organisations (dont l'Union européenne) à financer des projets de capteurs de brouillard similaires et à faire connaître ailleurs les avantages de cette technique. Le CRDI a coparrainé la première Conférence internationale sur les brouillards et la collecte des brouillards à Vancouver, en juillet 1998.
Préalables
Cette technique convient mieux aux régions où il y a constamment du brouillard qui peut être intercepté à l'intérieur des terres. Le brouillard devrait régner au cours de la saison où on a le plus besoin d'eau. Cinq autres conditions sont aussi importantes : une chaîne de montagnes qui a une altitude moyenne d'au moins 500 mètres; l'axe principal de la chaîne devrait être perpendiculaire aux vents dominants (ce qui augmente le volume d'eau recueillie); le point de collecte de l'eau devrait être le plus proche possible de la collectivité visée; la présence, sur l'autre versant des montagnes, d'un vaste bassin où les températures élevées le jour aident à attirer l'air de l'océan qui franchit les montagnes, est très certainement un atout; la direction des vents dominants doit être constante pendant toute l'année.
Utilisateurs éventuels
Des collectivités de toutes les régions du monde (en général dans les régions côtières ou sur les îles, mais parfois à l'intérieur des terres) où les précipitations sont faibles et où les conditions atmosphériques ressemblent à celles décrites ci-dessus. Outre le Chili, le Pérou et l'Équateur, les régions qui pourraient en bénéficier le plus comprennent la côte atlantique de l'Afrique australe (Angola, Namibie), l'Afrique du Sud, le Cap-Vert, la Chine, le Yémen oriental, Oman, le Mexique, le Kenya et le Sri Lanka.