Les acteurs majeurs de l'industrie économique, comme
Jacob Rothschild, ont souvent une vision plus claire de l'évolution du système que ne sont capables d'en produire nombre de ses critiques de gauche, cependant cette lucidité ne va pas jusqu'au bout de l'analyse, puisqu'elle reste immanente à son objet.
La distinction entre un "système sain" et "système malsain" opérée par
Remundo ne fait que constater une différence d'évolution formelle, alors qu'il n'y a pas de différence sur le fond: le système "sain" a toujours eu pour fonction de générer l'accumulation de la valeur abstraite, tout comme celui' "malsain", qui prévaut aujourd'hui et qui n'a fait que suppléer l'incapacité fonctionnelle antérieure.
Je reviens sur un point important afin d'éclairer deux aspects apparemment contradictoires des phénomènes actuels et qui dérivent du caractère double de l'argent, à la fois fictif et réel.
D'un côté, la quantité d'argent accumulée est absolument gigantesque et si l'on y ajoute la quantité d'argent qu'il est possible de "produire" spontanément*, on arrive à des sommes astronomiques, de l'autre un extractivisme vétilleux qui s'efforce d'extraire la moindre plus-value par toutes sortes de procédés imaginables, qui diminue progressivement le pouvoir d'achat en Occident et dispute pièce par pièce la valeur arrachée aux esclaves asiatiques ou africains. Un autre constat qui résulte de la même cause et qui n'est qu'un autre point de vue du même phénomène, est l'accroissement des disparités sociales.
C'est que cette double nature assez étrange de l'argent se réalise dans deux sphères distinctes qui ne communiquent que selon des chenaux limités: il n'y a jamais équivalence générale entre ces deux états, ce qui permet à l'extraordinaire niveau actuel de richesse de coexister avec l'austérité. Le virtuel de l'argent-dette réclame une contrepartie en argent réel: comme il le trouve de moins en moins dans l'industrie manufacturière, il se retourne contre la population. C'est une situation paradoxale, dans laquelle la majorité des agents économiques se trouvent subventionnés par le système (d'où leur forte adhésion, malgré les grincements de dents) et,
in fine se font ponctionner pour perpétuer (un temps) son fonctionnement! C'est un signe de plus de l'essoufflement du système qui ne peut plus surmonter ses contradictions que par de nouvelles, toujours plus grandes.
C'est aussi ce qui explique la difficulté de l'opinion publique a comprendre la situation autrement que par des simplifications visant principalement à désigner des boucs émissaires et ce ne sont pas les explications des économistes de service** qui vont contribuer à l'éclairer...
*Je fais allusion à l'argent qui est effectivement quotidiennement généré et non à des considérations théoriques car cela nous conduirait à raisonner par l'absurde.
**Fussent-ils même critiques, puisque tous défendent une version explicative conforme à leur "boutique".