
Comme il le fait deux fois par semaine depuis quelques mois, le chef de l'Etat était en déplacement jeudi 28 avril. Cette fois, il avait choisi la Corrèze et la ville d'Egletons, pour parler "de la filière bois". Mais Nicolas Sarkozy en a surtout profité pour évoquer l'écologie. Un thème porteur, après la catastrophe de Fukushima, qu'il compte reprendre à son compte dans la perspective de 2012, selon Le Figaro.
RETOUR À L'ÉCOLOGIE
Signataire du Pacte écologique de Nicolas Hulot, Nicolas Sarkozy avait ensuite beaucoup surfé sur ce thème avec le Grenelle de l'environnement piloté par Jean-Louis Borloo. Au-delà des réalisations concrètes de cette réunion, l'opération visait aussi à le positionner sur ces questions de plus en plus sensibles pour une partie de l'électorat.
Mais l'échec de la taxe carbone, retoquée par le Conseil consitutionnel fin décembre 2009, et la percée d'Europe Ecologie aux élections européennes et régionales, avaient semblé conduire l'Elysée à abandonner ce champ peu payant. Abandon matérialisé, devant les agriculteurs, le 6 mars 2010, par cette formule : " Je voudrais dire un mot de toutes ces questions d'environnement, parce que là aussi ça commence à bien faire." Quelques semaines plus tard, le gouvernement annonçait qu'il renonçait à présenter de nouveau la taxe carbone.
A un an d'une présidentielle qui s'annonce difficile pour lui, le chef de l'Etat s'aventure donc à nouveau sur les thèmes écologistes, avec une position "clivante"', comme disent les communicants : s'afficher pro-nucléaire et opposer le progrès à des écologistes qui veulent "revenir à la bougie".
Un discours à destination du monde rural, qu'il entend replacer dans une stratégie plus large : se réconcilier avec les Français, catégorie par catégorie, segment par segment. Quitte à revenir sur des mesures emblématiques du quinquennat.
LE BOUCLIER FISCAL SUPPRIMÉ
Les dernières interventions télévisées de Nicolas Sarkozy , qui n'hésite plus à reconnaître "des erreurs de jugement", sur la Tunisie par exemple, ont marqué ce changement de style, loin de la communication très martiale du gouvernement durant les premières années du quinquennat.
L'abandon du bouclier fiscal est l'exemple le plus probant de cette stratégie. Mesure phare de la loi travail-emploi-pouvoir d'achat (TEPA) de 2007, elle avait été maintenue contre vents et marée, même au plus fort de la crise, et même après que les socialistes furent parvenus à en faire l'emblème d'une "présidence des riches" qu'ils dénoncent. Mais à un an de l'élection, il sera finalement purement et simplement supprimé, remplacé par un relèvement du taux de l'ISF que les analyses disent plus inégalitaire encore. Une décision en grande partie dictée, là encore, par l'approche de la présidentielle.
L'HADOPI REMISE EN QUESTION
Mais la fiscalité n'est pas le seul domaine sur lequel l'Elysée est prêt à admettre ses erreurs. Mercredi 27 avril, en installant le Conseil national du numérique, Nicolas Sarkozy n'a pas hésité à faire un mea culpa en bonne et due forme sur la loi Hadopi contre le téléchargement illégal. "Je prends d'ailleurs ma part de l'erreur (...). L'intuition que j'avais, c'est qu'on ne pouvait pas [abandonner] les créateurs. Je pense que si on avait appris à mieux se parler, on aurait pu trouver un autre système", a expliqué le chef de l'Etat.
Un revirement qui peut surprendre : très critiquée dès ses débuts par les professionnels du Web, en partie censurée par le Conseil constitutionnel, devenue un symbole pour les internautes et les jeunes, cette loi avait, elle aussi, pourtant été soutenue contre vents et marées par l'Elysée, pour qui elle était emblématique d'un "Internet civilisé". La voilà donc sur la sellette.

LES AGRICULTEURS RECONQUIS À FORCE D'ATTENTIONS
Cette stratégie de reconquête par l'amende honorable sera-t-elle payante ? Elle semble avoir fonctionné chez les agriculteurs. Nicolas Sarkozy avait su les convaincre en 2007, mais les avait déçus par la suite. Une déception matérialisée par son dérapage, en 2008, au Salon de l'agriculture, avec le désormais fameux "Casse-toi, pauv' con" lancé à un quidam qui l'interpellait rudement. L'année suivante, en 2009, le chef de l'Etat s'était contenté d'une courte visite, presque en catimini.
Mais en 2010, il a ancé l'opération reconquête, multipliant les visites de terrain sur ce thème – pas moins de sept depuis août 2010, selon un pointage du Monde.fr . Une opération qui a finalement payé : selon une étude IFOP de février, Nicolas Sarkozy a repris vingt points auprès de cette catégorie, dans laquelle il est aujourd'hui majoritaire.
L'opération a également été lancée auprès de l'électorat catholique, objet d'attentions régulières, avec les professions médicales, ou encore avec les ouvriers, auprès de qui Nicolas Sarkozy est retourné souvent, renouant avec ses expressions de 2007, et principalement le "travailler plus pour gagner plus". Pour le moment, l'opération est moins payante : les catégories populaires semblent, selon les enquêtes d'opinion, lui préférer Marine Le Pen.
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