Le parcours de la loi Grenelle 1 s'est enfin achevé jeudi, avec le second passage devant le Sénat. Il aura donc fallu plus d'un an et demi pour que cette loi fixe, dans la législation nationale, les grandes orientations adoptées lors du Grenelle de l'environnement de la fin 2007. Le texte a été approuvé par l'UMP et les centristes mais aussi par le PS, qui s'est félicité de ses "réelles avancées".
Dite "loi de programmation", ce texte sans comporter de dispositions d'application directe (un objectif fixé à la loi Grenelle 2, dite "loi d'application", actuellement en cours d'examen) transcrit toutefois des modifications importantes dans tous les secteurs participant à la dégradation de l'environnement ou au changement climatique.
Deux secteurs sont particulièrement concernés : le bâtiment, avec une réduction des consommations énergétiques de 38 % d'ici 2020, et les transports (moins 20 % d'émissions de gaz à effet de serre d'ici 2020, les ramenant au niveau de 1990). Globalement, on peut retenir :
- Lutte contre le changement climatique
Confirmation de "l’engagement pris par la France de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 en réduisant de 3 % par an, en moyenne, les rejets de gaz à effet de serre dans l’atmosphère". De la même manière, l'objectif de "porter la part des énergies renouvelables à au moins 23 % de sa consommation d’énergie finale d’ici à 2020" est aussi dorénavant inscrit dans la législation nationale.
- Bâtiment
"Toutes les constructions neuves faisant l’objet d’une demande de permis de construire déposée à compter de la fin 2012 et, par anticipation à compter de la fin 2010, s’il s’agit de bâtiments publics et de bâtiments affectés au secteur tertiaire, présentent une consommation d’énergie primaire inférieure à un seuil de 50 kilowattheures par mètre carré et par an en moyenne". Toutefois, ce plafond de consommation pourra être supérieur pour "...les énergies qui présentent un bilan avantageux en termes d’émissions de gaz à effet de serre ... afin d’encourager la diminution des émissions de gaz à effet de serre". A compter de 2020, la législation en la matière se durcira encore, puisque toutes les constructions neuves à compter de la fin 2020 devront présenter une consommation d’énergie primaire inférieure à la quantité d’énergie renouvelable qu'elles produisent. Dans le secteur de l'habitat ancien, l'Etat se fixe la rénovation, d'ici 2020, de "800 000 logements sociaux dont la consommation d'énergie est supérieure à 230 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an ... afin de ramener leur consommation annuelle à des valeurs inférieures à 150 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré."
- Transport
Augmenter la part "du non-routier et non-aérien de 14 % à 25 % à l'échéance 2022".
A ce titre, 2000 km de nouvelles lignes ferroviaires à grande vitesse sont prévus d'ici à 2020, et "Les deux principaux axes Nord-Sud du réseau seront aménagés afin de permettre la circulation de trains longs d'au moins 1 000 mètres." Côté maritime, le "développement de lignes d'autoroutes de la mer sur la façade atlantique entre la France, l'Espagne et le Portugal et sur la façade méditerranéenne entre la France, l'Espagne et l'Italie ... auront pour objectif de permettre un report modal de 5 à 10 % des trafics concernés". Au niveau des poids lourds, "Une éco-taxe sera prélevée ... à compter de 2011 à raison du coût d'usage du réseau routier national métropolitain non concédé et des voies des collectivités territoriales susceptibles de subir un report de trafic". Le gouvernement devra également présenter prochainement une étude "sur les enjeux et les impacts relatifs, d'une part, à la généralisation de l'autorisation de circulation des poids lourds de 44 tonnes et, d'autre part, à la réduction de la vitesse à 80 kilomètres/heure pour tous les poids lourds circulant sur autoroute et à leur interdiction de se dépasser sur ces axes".
- Biodiversité
Une trame verte et bleue, ou corridor écologique visant à faciliter la circulation des espèces va être élaborée, tandis que d'ici dix ans, 2 % au moins du territoire terrestre métropolitain seront protégés, ce qui "implique notamment la création de trois nouveaux parcs nationaux et l'acquisition ... de 20 000 hectares de zones humides".
Le principe de "compensation" de la perte de biodiversité est retenu, visant à "rétablir les effectifs des espèces ou variétés menacées et les superficies des milieux auxquels il a été porté atteinte".
- Agriculture
La surface agricole utile, menée en agriculture biologique, sera portée à 6 % en 2012 et 20 % en 2020. "Le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique sera doublé dès l'année 2009". Pour les pesticides, "les quarante substances les plus préoccupantes en fonction de leur substituabilité et de leur dangerosité pour l’homme" seront retirées du marché (trente au plus tard en 2009, dix d’ici à la fin 2010). D’autre part, l'usage des "substances préoccupantes pour lesquels il n’existe pas de produits ni de pratiques de substitution techniquement et économiquement viables" devra "diminuer de 50 % d’ici à 2012".
D'ici la fin de l'année 2009, "un état des lieux de la santé des agriculteurs et des salariés agricoles et un programme de surveillance épidémiologique" sera lancé. Enfin, "Une politique nationale visera la réhabilitation des sols agricoles et le développement de la biodiversité domestique, cultivée et naturelle dans les exploitations.", tandis que d’ici la fin 2009, un dispositif d’inscription spécifique devra permettre d'ouvrir "le catalogue des semences aux variétés locales anciennes, y compris les variétés population, et aux variétés menacées d’érosion génétique, afin notamment d’en faciliter l’utilisation par les professionnels agricoles."
- Santé
En ce qui concerne l'air intérieur, "les produits de construction et d'ameublement ainsi que les revêtements muraux et de sol, les peintures et vernis et l'ensemble des produits ayant pour objet ou pour effet d'émettre des substances dans l'air ambiant" seront soumis "à un étiquetage obligatoire à partir du 1er janvier 2012, notamment sur leurs émissions et contenus en polluants volatils". Simultanément, "les substances classées cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction de catégories 1 et 2 (CMR 1 et CMR 2) seront interdites dans ces produits, "au sens de la réglementation européenne".
- Déchets
Outre "la production d'ordures ménagères et assimilées de 7 % par habitant pendant les cinq prochaines années", le recyclage des déchets ménagers et assimilés devrait être porté à 35 % en 2012 et 45 % en 2015 (24 % en 2004). "Ce taux étant porté à 75 % dès 2012 pour les déchets d'emballages ménagers et les déchets banals des entreprises hors bâtiment et travaux publics, agriculture, industries agro-alimentaires et activités spécifiques." De même, la problématique des déchets organiques est enfin prise en compte, avec l'amélioration de "...la gestion des déchets organiques en favorisant en priorité la gestion de proximité de ces derniers, avec le compostage domestique et de proximité, et ensuite la méthanisation et le compostage de la fraction fermentescible des déchets ménagers et plus particulièrement celle des déchets des gros producteurs collectés".
- Impact environnemental des infrastructures
La loi Grenelle 1 reprend également pour "les décisions publiques susceptibles d'incidence significative sur l'environnement", la nécessité d'apporter "la preuve qu’une décision alternative plus favorable à l’environnement est impossible à un coût raisonnable".