Modèle et émiettement dans l'économie réelle (notes sur Wolfgang Streek II)
Selon la description et les observations faites par l'auteur (et si mes neuronnes ont bien capté):
Wolfgang Streek (traduit pas Obamot) a écrit :— «Les entreprises sont des institutions sociales, et pas seulement des réseaux de contrats privés ou la propriété de leurs actionnaires [dans le modèle de compromis germanique].
Leur ordre interne serait une question d'intérêt public et serait soumis à une réglementation sociale étendue, par la loi et les accords industriels.
En outre, les gestionnaires de grandes entreprises allemandes font avec une gestion des capitaux et un «marché du travail» qui sont très bien organisés, permettant à la fois au détenteurs du capital et aux «forces de travail» de participer directement au processus décidionnel quotidien de l'entreprise, exigeant que les décisions soient continuellement [re?]négociées.
Les décisions prennent ainsi plus de temps, mais sont également plus faciles à mettre en œuvre une fois prisent».
Ainsi, toujours si on en croit l'auteur [et la traduction] et puisque les entreprises sont dans le paradigme argent-dette, voyons un peu ça sous l'angle de la «gallette».
«Marché des capitaux»Toujours selon l'auteur:
Wolfgang Streek a écrit : «[...] Le marché de capitaux allemand n'est pas fondé sur un paradigme de «contrôle [total] des marchés». Beaucoup d'entreprises continuent d'être en mains privées, et seulement une petite partie du capital productif est coté en bourse, les banques peuvent détenir des actions, mais l'actionnariat est très concentré, et les actions et les entreprises ne changent pas souvent de mains.
[Cependant], les entreprises se financent par des capitaux propres moins que par le biais du crédit bancaire à long terme.
Depuis que les banques peuvent voter par procuration au nom d'actions qu'ils détiennent en dépôt, elles peuvent contrôler efficacement la gestion du rendement, ce qui leur permet d'«octroyer» aux entreprises des prêts à long terme et crée une incitation pour eux à ne pas [trop] spéculer [directement] avec les capitaux.
[On peut en déduire également plus loin] que les forces syndicales seraient similairement présentes dans les entreprises, exerçant des droits légaux [opposables] au travers des Conseils représentant les travailleurs, fonctionnant comme des organismes de supervision. Ensemble, ces systèmes de régulation appliqués collectivement et en conformité avec la réglementation juridique, ferait que cette co-détermination du régime de l'emploi rendrait difficile pour les employeurs de licencier les travailleurs [de façon arbitraire] [...]»
PS: texte entre [crochets]: implicite et recadré depuis l'allemand.
A ce stade, nous sommes effectivement face à une sorte de droit opposable. Mais c'est quand même un aménagement sophistiqué et évolué des trois [‘CON’] de Mc Grégor => CONduire, CONtraindre, CONtrôler, seulement ils ont rajouté de façon CONcertée et CONsentante (j'ai bon?)
Quelques commentaires (Sur ce système et sans prendre une position perso)
L'arbitrage des banques sur la productivité des entreprises (associant travailleurs et syndicats ...et donc également les managers jusqu'aux cadres supérieurs qui sont aussi des «travailleurs»), devrait nous suggérer que les entreprises ne seraient pas en mesure d'assumer à elles-seules le challenge de productivité qui leur incombe intrinsèquement et surtout que cela permettrait le contrôle par le biais du «monitoring de la performance du management» (ce que j'appelle ailleurs le «
nouveau management»).
C'est très habile! Et éventuellement le reflet de la société, mais aussi un aveu de taille: le système capitaliste, présenté comme si vertueux, aurait donc échoué dans «la motivation des hommes au travail»!
Ainsi les banques surveilleraient/conduiraient/contrôleraient néamoins subtilement le système en fondant le benchmarking sur une sorte de sophisme qui serait en fait un pur alibi pour «installer un pouvoir». Partant d'arguments tirés des ‘saintes écritures’:
— la propension naturelle de l'homme à l'oisiveté (qu'il faut combattre absolument, dès l'enfance et jusqu'à la fin...!)
— de l'a priori biblique du syndrome de culpabilité! (On culpabilise d'abord, on voit ensuite).
Alors qu'en principe «l'économie de marché» chercherait par vertu à faire en sorte de rendre les individus responsables, on découvre qu'à priori «on ne pourrait leur faire confiance!». Ce qui est totalement faux naturellement, mais c'est encore plus efficace que le nerfs de la guerre: les sous.
Les Allemands sembleraient avoir cependant compris le parti à tirer de leur modèle, en limitant a contrario l'influence des banques... Prétendre que les entreprises seraient immunisées des visées des banques à ne pas profiter de leur position pour spéculer sur les marchés via la gestion des rendements est amha une pure vue de l'esprit à très long terme! Puisqu'au gré des changements et adaptations, les spéculateurs financiers avanceraient leurs pions, le temps travaillant pour eux (1... 2... 3... générations ou plus, ils ne sont pas pressés), elles finiraient ainsi par contrôler avec le temps toutes les sociétés et ramasser le jackpot (c.f. Goldman Sachs etc) seulement ça prendrait du temps: qu'importe lorsque la trahison est découverte, tous les anciens sont déjà ...morts! Évidemment, cela se fait insidieusement et surtout dans un silence.... bancaire de mort.
Cela résulte de l'observation des faits sur le long terme dont les exemples foisonnent dans l'histoire récente autant que plus ancienne. Dans ce contexte, l'exercice des droits légaux est assez illusoire — consolation: elle est au moins temporaire — puisque la forme juridique SUIT l'évolution des transmutations successives. Ainsi la co-détermination par les Comités d'entreprise — même si elle marche sûrement très bien en tant que garde-fous — fait planer un doute que l'on puisse en faire une généralité sous la haute protection de «Conseils de surveillance».
Mais je reconnais que je ne suis pas assez qualifié pour connaître la conformité avec la réglementation juridique actuelle (discipline qui est relative au «Droit comparé»...)
Cependant Wolfgang Streek admet lui-même, qu'un tel système n'est applicable qu'à l'Allemagne, pour des raisons que je vous invite à découvrir en lisant ce texte très intéressant de 28 pages.
Le point positif que l'on peut éventuellement en tirer, c'est que ce système de co-détermination prend en charge un régime de collaboration, qui il faut le rappeler: rend difficile pour les employeurs de licencier des travailleurs (excepté évidemment les cas extrêmes de faillite, etc). C'est un peu un paradoxe, mais ça fonctionne du moment qu'on a affaire à une population de travailleurs qui ne rechignent pas à la tâche. Et nos cousins germains sont connus pour ça culturellement. C'est peut-être un modèle dur, mais un qui est éventuellement antagoniste au type de modèle qui produit un émiettement répétitif.
Le point négatif, c'est évidemment que ça ne réunit pas – entre autre – quelques avantages du «
Dividende universel»!
On se lasse de tout, excepté d’apprendre… ( Virgile )
Il faut se rappeler que tout ça est très théorique.
Je laisse à ceux qui veulent, le soin de faire une meilleure synthèse, car la mienne est sans doute très incomplète.