Solaire photovoltaïque : remise en question de la TVA à 5,5 %
ENERGIES - Actu-Environnement.com - 22/07/2009
La direction générale des impôts du Gard vient de remettre en question la TVA réduite pour les installations photovoltaïques de moins de 3 kWc chez les particuliers. Questionnements sur une prise de position à haut risque pour toute la filière.
Le cas de Luc Aurifeille, directeur général d'Energie Totale Méditerranée (ETm) semble être le premier… mais peut-être pas le dernier !
Comme l'ensemble de la profession, cet installateur appliquait un taux réduit de TVA pour la fourniture et la pose de panneaux solaires photovoltaïques chez les particuliers dès lors que la puissance installée n'excédait pas 3 kWc (kilowatt crête). Pourtant l'entreprise vient de faire l'objet d'une proposition de rectification de la part de l'administration fiscale (comprenez un redressement), qui lui conteste le droit d'appliquer un taux réduit. La raison ? Selon la direction générale des impôts du Gard, les clients revendant la totalité de l'électricité produite à EDF, même avec un seuil de 3 kWc, sont considérés comme producteurs exclusifs, et par là, assujettis à la TVA. Ils ne peuvent donc pas bénéficier d'un taux réduit de TVA lors de l'installation.
De son côté, l'ensemble de la profession se base sur une décision de rescrit datant du 4 décembre 2007, précisant qu'il est présumé qu'il n'y a pas de livraison, et donc pas d'assujettissement à la taxe, dès lors que la puissance installée n'excède pas 3 kWc et ce, quelle que soit la nature du contrat d'achat. Le contrôleur des impôts, lui, se base sur une autre partie du texte : une personne qui effectue de manière indépendante, quel que soit son statut juridique ou sa situation au regard des autres impôts, des livraisons d'électricité en retirant des recettes ayant un caractère de permanence, est assujettie à la TVA. Elle peut donc à ce titre déduire la taxe qui a grevé son investissement. C'est le cas du producteur dit exclusif. Quelle est la bonne lecture ? Il semble qu'il y ait une nécessité de clarification des textes, au vu des conséquences que peuvent avoir ces différentes interprétations.
Le point de vue des professionnels
Il ne faut pas confondre un industriel qui fait du photovoltaïque un business et un ménage qui ne fait pas un commerce absolu de l'électricité produite ! Cette décision va à l'encontre de l'initiative gouvernementale qui veut promouvoir les énergies renouvelables. Mais la réglementation n'est pas claire, explique Stéphane Duponchel, fondateur de l'agence de conseil en environnement Amezis et membre de l'association des producteurs d'électricité solaire indépendants APESI.
Pour Emmeline BLONDEAU, chargée de mission photovoltaïque auprès de l'association HESPUL, il doit s'agir d'une erreur d'interprétation. Le rescrit de 2007 précise bien que le taux réduit s'applique sur une installation dont le seuil ne dépasse pas les 3kWc et ce, quelle que soit la nature du contrat d'achat conclu avec EDF. Contactée par l'association, la direction générale des impôts de l'Aude confirme cette lecture.
De même au niveau parlementaire, la limite de 3kWc est indiqué comme seuil pour la taxation réduite, à l'instar de la mention faite à l'article II-2B du très récent rapport parlementaire du député Serge Poignant qui indique que la taxe sur la valeur ajoutée a vu son régime précisé par un rescrit du 4 décembre 2007 : elle s'applique au taux réduit pour l'installation de panneaux dont la puissance se limite à 3 kWc, au taux normal si elle excède cette limite. Le produit de la vente par les particuliers est exonéré. Les fermes solaires sont pour leur part toujours soumises au taux normal.
Les conséquences pour ETm… et bientôt d'autres ?
En attendant, Luc Aurifeille a entamé une procédure de recours à la suite de cette décision : je ne remets pas forcément en question l'interprétation qu'a fait le contrôleur fiscal du texte. Mais dans ce cas-là, cela signifie que l'ensemble de la profession respecte des règles du jeu qui ne sont pas fondées… Je voudrais également alerter sur le manque de cohésion de l'administration fiscale dans l'application des rescrits. En effet, aujourd'hui je vais être contraint d'appliquer une TVA à 19,6 % pour mes prestations alors que mes concurrents installés dans d'autres départements continueront à travailler avec un taux à 5,5 %. Je suis donc pénalisé : cela fait une différence de près de 3.000 € sur la facture finale. Aujourd'hui, près de 3.000 entreprises en France installent des panneaux photovoltaïques chez des particuliers. Si les règles du jeu sont soumises à interprétation, il va y avoir des injustices.
Si l'administration fiscale confirme sa décision, le directeur général d'ETm devra rembourser le différentiel de TVA, qui s'élève à près de 300.000 €, ce qui n'est pas rien pour cette entreprise de 30 personnes.
Mais il y a pire car, forts de cette ''jurisprudence'', des redressements analogues pourraient se généraliser sur le territoire national, venant ainsi ébranler toute la filière photovoltaïque B2C française. Un comble au moment où, au plus haut niveau de l'État, on assure tout mettre en œuvre pour rattraper, voire prendre de l'avance sur les secteurs des EnR et plus particulièrement du photovoltaïque !
S.FABREGAT
Source: http://www.actu-environnement.com/ae/ne ... _7972.php4