Le Potager du Paresseux : Jardiner plus que Bio sans fatigue

Agriculture et sols. Pollution, contrôles, dépollution des sols, humus et nouvelles techniques agricoles.
phil53
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par phil53 » 12/07/16, 07:58

Qu'est ce qui fait que l'herbe coupée en tas fermente et que la même épaisseur de foin mouillé ne fermente pas, enfin pas de la même façon?
Est-ce seulement la chaleur issue de la fermentation qui abîme les plantes ou aussi les produits de la décomposition qui attaquent la partie vivante?
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Did67
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Did67 » 12/07/16, 09:36

L'herbe verte mouillée, c'est une biomasse assez complète, équilibrée : ce sont les cellules vivantes, fonctionnelles... Il y en donc forcément "tout ce dont une cellule a besoin pour fonctionner correctement" Tu fauches, les cellules continuent de vivre [comme vivent les cellules de la salade fraichement cueillie que tu manges !] !

Il n'y a que le manque d'eau, suite au dessèchement, qui va ralentir puis stopper les processus biologiques. Les cellules réagissent, en transformant vite fait certaines molécules, pour stocker la matière et l'énergie, en espérant des jours meilleurs ! Qui ne viendront pas...

Donc cette herbe est un milieu vivant, équilibré, où les micro-organismes vivants vont trouver ce dont ils ont besoin.

En plus, la fauche aura abimé les tiges. Les micro-organismes vont attaquer plus facilement.

Il y a donc une multiplication explosive de ces organismes, d'autant plus qu'il fait chaud... Les bactéries, capables de se diviser en deux toutes les quelques minutes, favorisées par des températures élevées (25 à 40°) vont prendre le dessus.

Cela "fermente". La chaleur dégagée par l'activité des cellules, comme celle que dégage notre corps, va s'accumuler car le foin est assez isolant (notre corps, grâce à al circulation / respiration / sudation, évacue la chaleur et "règle" sa température ; pas les bactéries dans un tas d'herbe !). Comme je l'ai maintes fois développé, cela de la chaleur perdue, donc de l'énergie qui part dans le ciel sans utilité (sauf "couches chaudes"). Des fois, les tas prennent feu. Au milieu de cette fournaise, la vie est stérilisée et s'arrête. C'est à la périphérie de cette boule de chaleur que les bactéries agissent.

Le foin qui se réhydrate, même si la "composition chimique" est quasiment la même, ne réagit pas tout à fait comme ça : les processus vivants s'étaient arrêtés ; certains produits s'étaient transformés lors de cet arrêt progressif. Chacun peu l’observer : le foin réhydraté ne redevient pas vert ! Il ne se remet pas à vivre ! La réhydratation d'ailleurs, est progressive. Donc cela ne "fermente" plus avec la même vigueur. L'équilibre bactéries / champignons est mieux respecté car les bactéries ne trouve pas un "milieu de culture vivant", où tout est prêt.

Ce qui attaque la matière organique (biomasse vivante dans le cas de l'herbe, matière organique fraiche - non décomposée mais morte - dans le cas du foin), ce sont l'action des microorganismes : bactéries comme champignons "digèrent" en dehors de leur "corps" ; ils émettent des enzymes, de leur fabrication, qui "digèrent" la matière organique. Il faut bien se rappeler que ce sont des monocellulaires. Ils ne sont pas structurés comme les animaux supérieurs, avec des "appareils", dont un tube digestif. Ce sont donc de simples ultra-micro-usines, des nano-usines pourrait-on dire, qui synthétisent et émettent les enzymes digestives, puis "absorbent" à travers leur membrane cellulaire, le fruit de cette digestion externe qui leur apporte ce dont elles ont besoin pour se diviser en deux (survivre et se diviser est leur "objectif"). C'est comme cela qu'elles se nourrissent.

On dit alors, dans le langage courant, que "cela pourrit". On a cru jusqu'à Pasteur que c'était un processus "naturel". On sait depuis Pasteur que c’est l'action des micro-organismes et qu'il suffit de neutraliser ces derniers pour que cela ne "pourrisse" plus et se conserve ("pasteurisation").

C'est donc une digestion externe. La chaleur n'y est pour pas grand chose, même si certaines molécules sont "dégradées" ou transformées par la chaleur. Quand tu fais une confiture, tu chauffes de la biomasse. Tu perds des vitamines. Cela "brunit" un peu, se caramélise. Il y a donc toutes sortes de réactions, de transformation. Mais pas de décomposition !
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Mathilde
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Mathilde » 13/07/16, 09:37

Coucou ! Je te remercie beaucoup pour ces explications détaillées et les démonstrations en images .
Je compte bientôt faire un potager (un beau, je l’espère !) et du coup, je cherche toutes les infos nécessaires afin de ne pas échouer :P.
Je te souhaite de passer une très bonne journée ;).
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Remundo » 13/07/16, 10:26

Ah oui, le sujet Jardin de Didi, ça devient un incontournable sur éconologie :D
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Did67
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Did67 » 13/07/16, 12:04

Mathilde a écrit :Coucou ! Je te remercie beaucoup pour ces explications détaillées et les démonstrations en images .
Je compte bientôt faire un potager (un beau, je l’espère !) et du coup, je cherche toutes les infos nécessaires afin de ne pas échouer :P.
Je te souhaite de passer une très bonne journée ;).


Merci beaucoup. C'est sympa de recevoir des encouragements plutôt que de s'engueuler ou de se livrer à des batailles d'égo... Cela va dans le sens d'une société "meilleure", telle que je la rêve !

C'est un encouragement pour, cet hiver, remettre mon projet de livre sur l'ouvrage ! Avec de façon ordonnée des choses plus ou moins évoquées en pagaille ici.

Comme je l'ai indiqué à Julienmos plus haut, surtout ne pas hésiter à poser des questions, ne pas sentir gêne : cela m'oblige à "clarifier", à "décanter" ma pensée... Cela ne peut que contribuer à améliorer la qualité de mon projet. Toute question honnête est un service rendu...
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Did67 » 13/07/16, 12:05

Remundo a écrit :Ah oui, le sujet Jardin de Didi, ça devient un incontournable sur éconologie :D


Rendez-vous chez mon cardio hier : il semblerait que tout soit bien retapé ! Alors je pense reprendre du poil de la bête !
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Julienmos » 13/07/16, 12:56

Did67 a écrit :
En environ 3 ans, une couche de 15 cm de BRF disparait complètement.


Enfin, se méfier des "BRF" issus des chantiers forestiers ou de bord de route. Généralement, avec de gros broyeurs et des moteurs puissants, tout y passe : le "vieux bois" (duramen), qui se décompose mal comme les branches et l'aubier (vrai BRF). Le "produit" obtenu est un mélange de "vrai BRF" et de "plaquette forestière". En proportion variable. Il est appelé un peu abusivement "BRF" (pour profiter de l'engouement pour ce "produit" ?).


bonjour (et merci pour l'encouragement à poser des questions !)

je relève cet extrait...

puisque je viens justement d'étaler un tel "mélange", prélevé en bord de route.

Comme il y a très peu de chances que ce soit du BRF pur, et qu'il y a sans doute une forte proportion de bois "dur" provenant du broyage de branches plus épaisses voire de troncs (même si ce n'étaient que des arbustes de haie), je me demande le temps que ça va mettre pour se décomposer... 10 ans ? :shock: :)

surtout que ma couche doit faire au moins 15 à 20 cm d'épaisseur... sur une surface de 12 m².

Comme de plus, si j'ai bien compris, cela produira certes de l'humus stable, mais ne fertilisera pas vraiment le sol, dois-je regretter d'avoir saisi cette opportunité (de récolter ce broyat disponible et gratuit) ?
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Did67 » 13/07/16, 15:43

A mon avis : aucun regret à avoir ! Dans le passage cité, j'insiste sur la distinction BRF/plaquettes pour pas que les gens, par manque de connaissances, ne se fassent avoir "bêtement".

Il faut toujours garder à l’esprit une règle, que j'ai déjà évoquée dans ce fil : "dans la nature, rien n'est jamais tout noir, rien n'est jamais tout blanc ; il y a juste des nuances de gris". Ou, si on veut, en toute chose, des avantages et des inconvénients ! Notre rôle d'accompagnants intéressés des "forces de la nature" est de minimiser les inconvénients et d'optimiser les avantages ! C'est tout.

1) Ce que tu as mis, c'est sans doute un mélange de "vrai BRF" (les branches broyées) et de plaquettes (troncs broyés, avec du bois plus lignifié)... Dans une proportion qu'on ne saura jamais.

2) Les "plaquettes" vont certes être un peu plus coriaces.

Mais la différence ne sera pas très marquée. Le processus de décomposition dépendra surtout de l’intensité de la vie biologique de ton sol, et notamment de l'activité des champignons. Si ton sol n'a pas été matraqué par des fongicides (y compris "bio") qui se seraient accumulés, cela va "blanchir" très vite. Ce seront les filaments des champignons regroupés en "mycélium". Très bon signe. J'ai cru comprendre que tu traitais une prairie : rien à craindre !

La part "plaquettes" va induire un effet dépressif la première année - cela ne veut pas dire que rien ne pousse ; cela veut juste dire que cela sera un peu "pâlichon", par manque d'azote.

La part "BRF", au contraire, va "booster" dès la première année par les sucres, même si un manque d'azote peut aussi se signaler.

3) En effet, ce matériau, contrairement au foin, devra être considéré comme étant pauvre question apports d'éléments nutritifs (azote, phosphore, dans une moindre mesure potassium). L'effet fertilisant, suite à sa décomposition, sera donc beaucoup plus faible que celui qu’aurait une quantité équivalente de foin. Mais s'il apporte peu, il n'enlève rien !!!

Mais il aura deux effets induits très importants :

a) la formation d'humus, qui aura un effet positif sur la structure de ton sol (la formation de petites mottes), sa capacité à "retenir" l'eau et la majorité des éléments nutritifs minéralisés. Et ce avec un effet durable sur le très long terme. L'humus stable dont je parle, une fois formé, se minéralise ensuite à raison d'environ 2 % par an !

b) la stimulation des champignons. Or ceux-ci ont la capacité d'aller extraire des minéraux peu ou pas disponibles pour les plantes, notamment le phosphore, qui se "planque" dans le sol. Depuis Tchernobyl, cette capacité est connue : les champignons étaient beaucoup plus radioactifs que les légumes tout simplement parce qu'ils fixent bien mieux les minéraux. Donc il y a aura un effet fertilisant indirect par le biais de cette mobilisation. Quand ils vont mourir, ces champignons vont libérer ces éléments. Et parfois même avant, si ce sont des champignons mycorhiziens qui forment une symbiose avec les racines des plantes.

Donc surtout ne rien regretter. Bien au contraire. Juste peut-être être patient et ne pas s'attendre à un phénomène spectaculaire cette année ou l'année prochaine ! [Pour cela, comme dans l'Alpes d'Huez, il faudrait de l'EPO = engrais minéraux directement assimilables]

Ta remarque fait penser à combien il est difficile de rendre compte avec exactitude de la complexité des phénomènes qui se produisent dans le sol. Cela dépasse ce qu'un cerveau humain est capable de "concevoir", comprendre, imaginer, décrire... Et encore plus ce qu'un forumeur comme moi peut écrire - même à travers des posts plutôt longs !

PS : Quelque part dans ce fil, je dois rendre compte comment ma femme avait trouvé de la sciure et des copeaux qu'une personne (artisan ?) peu scrupuleux avait jeté dans la forêt et que nous avons récupéré dans des sacs poubelles. Là, c'était du bois mort pur !
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par Did67 » 13/07/16, 16:20

Remundo a écrit :Ah oui, le sujet Jardin de Didi, ça devient un incontournable sur éconologie :D


Je pense que le titre mériterait un ultime lifting, pour plus de cohérence : "Le Potager du Paresseux" : jardiner plus que bio sans fatigue...

[car il n'y a pas que du semis direct - je plante aussi des plants élevés en godets ; et le "Potager du Paresseux" ferait le lien avec les vidéos sur Youtube, que j'intitulerai toutes comme ça ; l'histoire du semis direct est une scorie issue du débat dont a été dérivé ce fil...]

[Mais noooooonnnnn, je ne suis pas chiiiiiiiiiiiiiannnnnnnnnnnnt !]
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Re: Jardiner plus que bio en semis direct sans fatigue ?




par chatelot16 » 13/07/16, 17:19

did en tant que moderateur tu devrait pouvoir modifier le titre ... sur l'ancien phpbb il suffisait d'editer le premier message ... sur le nouveau je n'en sait rien puisque les utilisateur ordinaire ne peuvent plus editer
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