Solutions Climat – Si j’étais un…Les gouvernements sont mal placés pour agir, coincés comme ils le sont entre des traités internationaux signés par leurs prédécesseurs et par eux-mêmes, les gros acteurs de l’économie qui n’ont aucun intérêt financier à s’alarmer en l’absence de pression, et leurs électeurs qui veulent le plein emploi, des services efficaces et des baisses d’impôts.
Si j’étais un… consommateur conscient et prévoyant, je m’apercevrais que nous sommes beaucoup et que nous sommes, tous ensemble, à l’origine de nos problèmes actuels. En effet, sans consommateurs, pas besoin d’énergie fossile, d’industrie, de chimie, d’agriculture, d’élevage, de transport, de chauffage…
Mais je consomme, et vous aussi, et loin de moi l’idée de regarder la débâcle arriver sans rien faire. Or, comme ce sont mes choix de consommation et les vôtres qui nous ont menés là où nous en sommes, non seulement je peux y faire quelque chose, mais je peux aussi me préparer aux conséquences annoncées, et prendre mes précautions.
Si j’étais un… consommateur conscient et prévoyant (et égoïste) :•
Je vendrais ma propriété en bord de mer et n’en achèterais pas une à moins de 10 mètres d’altitude, mais pas non plus au bord d’une haute falaise que l’érosion croissante va gruger sous peu. Pour mettre les pieds dans l’eau, la location m’ira très bien.
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Je croiserais les cartes des températures et des précipitations de ces dernières années et j’irais m’établir ou m’acheter une maison dans une des régions qui souffre le moins des canicules et des sécheresses, avant que tout le monde y pense.
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Je déciderais dès maintenant de ma façon de vivre et de me déplacer, car lorsque le pétrole sera tout à fait hors de prix (ou interdit? On peut rêver), il sera trop tard pour s’y préparer. Par exemple, il sera de moins en moins rentable de travailler loin de chez soi.
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Je m’équiperais de quelques sources d’énergie renouvelables. L’énergie géothermique, hydraulique, éolienne et solaire que je peux capter fera baisser mes émissions de CO2 et disparaître mes factures, ce qui me remboursera peut-être les équipements nécessaires, et je me bénirais d’y avoir pourvu avant que les prix n’explosent, ce qui ne manquera pas d’arriver.
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Je planterais des arbres et des haies, je cultiverais paresseusement mon potager, sans produits chimiques, et laisserais une portion de mon terrain à l’état sauvage.
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Je m’affilierais à une coopérative de produits verts et bio. À quoi bon faire des kilomètres en voiture pour aller chercher des produits plus écologiques dans 15 commerces dispersés? Il vaut mieux bénéficier des prix de gros et du transport groupé que peut offrir une telle coopérative.
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Je m’intéresserais à la nature. On ne comprend bien que ce que l’on connaît bien.
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Je m’informerais à fond et à des sources variées afin de me faire ma propre idée des événements et des conclusions à en tirer.
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Je boycotterais les produits des gros pollueurs. Je chercherais donc à savoir qui pollue, afin d’éviter d’enrichir les pires pollueurs avec mon argent.
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Je remplacerais la viande au moins une fois sur deux (pour commencer), ça contribuerait déjà à réduire de 50% les émissions de méthane et la déforestation associées à l’élevage dont je suis responsable, à rendre des surfaces agricoles à des cultures de meilleur rendement alimentaire et à réduire la consommation d’eau potable.
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Je chercherais à réduire le bilan carbone de mes déplacements. À pied, en patins à roulettes, en trottinette, à vélo, surtout qu’il paraît que 30 minutes d’exercice (même la marche) par jour suffisent déjà pour faire un bien énorme à la santé. J’économiserais ainsi essence et usure de mon véhicule, et puis, lorsque la voiture serait nécessaire, je rendrais mes déplacements plus efficaces en groupant mes achats et mes rendez-vous, et en faisant si possible du covoiturage. Évidemment, je pourrais encore couper un bon pourcentage de mes émissions de carbone en levant le pied.
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Je prendrais les transports en commun pour me rendre au centre-ville. Les centres-villes sont des hauts lieux de la consommation inutile d’essence. Courtes distances, bouchons, multiplication des feux de circulation font que nos véhicules y sont plus souvent à l’arrêt qu’en mouvement. Tandis que dans un autobus ou un train bien remplis, la part des émissions de carbone de chaque usager est beaucoup plus faible que dans une voiture, même bien remplie.
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Je prendrais la plupart de mes vacances autour de chez moi. Je n’ai pas vraiment besoin de traverser des océans pour échapper à mon quotidien et me reposer. L’avion est l’un des pires émetteurs de carbone, alors qu’il suffit souvent en France de faire 30 à 50 kilomètres pour changer de fromages, de vins, de plats traditionnels, voire même de paysages et de climat!
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Je me trouverais des hobbies et des activités qui nourriront ma curiosité, mon corps et mon esprit sans trop consommer ni alourdir mon bilan carbone.
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Je mangerais des produits locaux et de saison. Les produits venant d’ailleurs ou issus d’élevages ou de cultures en serre intensifs coûtent cher en émissions de gaz à effet de serre et autres atteintes à l’environnement.
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Je mangerais plus souvent bio. Les produits bio sont chers parce qu’ils sont plus rares et que leur culture a un rendement plus faible. Si nous en demandons plus, il s’en cultivera plus et leur prix baissera, et puis il y aura moins de phosphates et de pesticides dans mon assiette, dans les sols, dans les nappes phréatiques et dans les rivières.
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J’achèterais des produits industriels locaux. Les Chinois nous inondent de produits bon marché et sont devenus, avec mon accord tacite, les plus gros pollueurs de la planète, alors même que nous nous rendions compte que ça ne peut plus continuer ainsi. Bientôt, ils pourront tous s’acheter une voiture grâce à mes achats inconsidérés et se mettre à consommer comme moi, et nous aurons fait un immense pas en avant vers le désastre. Favoriser les produits locaux limite les transports, préserve des emplois dans ma région et, même si rien n’est parfait, permet l’application de certaines lois anti-pollution qui n’existent pas ailleurs.
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Je ferais des achats responsables. Je lirais les étiquettes, je chercherais à connaître le bilan carbone, et plus généralement, environnemental, de tous les produits, afin de n’acheter que les moins dommageables.
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Je ferais durer mes objets. Je choisirais des produits utiles et nécessaires, de bonne qualité, je les entretiendrais, les réparerais et les emploierais avec modération, puis je recyclerais tout ce qui peut l’être. Remplacer au plus vite mon véhicule en bon état et bien réglé pour un autre qui consomme 30% d’essence en moins n’est pas forcément écologique. En levant le pied, je consommerais 30% d’essence en moins et ne ferais pas payer à mon prochain la « facture environnementale » de la fabrication d’un véhicule neuf.
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Je renoncerais à avoir plus et « mieux ». Mon téléphone cellulaire fonctionne? Extra, mais l’industrie s’échine à me persuader que j’ai également besoin qu’il prennent des photos et des films, qu’il permette de naviguer sur Internet, d’écouter de la musique et de regarder la télé, qu’il inclue un GPS, qu’il serve de disque dur, qu’il soit connecté de toutes les façons possibles, qu’il soit plus plat et plus léger, et ainsi de suite. Comme je n’utiliserai jamais toutes ces fonctionnalités et que ça ne me rend pas plus séduisant de posséder un appareil de dernière génération. Je me contenterais de ce que j’ai. Je n’ai pas besoin de plus de puissance, de gadgets et de colifichets. Je peux suivre le même raisonnement en ce qui concerne mon ordinateur et bien d’autres choses.
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Je réduirais ma consommation de produits chimiques et synthétiques. Je n’ai pas besoin de 20 produits de soins différents, ni de tout soigner avec des médicaments, ni de 10 produits de nettoyage, ni d’insecticides, pesticides, fongicides, toujours plus concentrés et plus efficaces. Leur fabrication et leur utilisation génèrent bien trop de pollution, et la nature n’a rien prévu pour neutraliser et absorber des molécules qui n’existaient pas il y a 100 ans à peine. Je vais plutôt aller fouiller dans les trucs de (d’arrière-)grand-mères pour savoir comment elles faisaient pour sentir si bon, soigner leurs grippes, nettoyer leur maison et chasser les fourmis et les pucerons.
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J’améliorerais l’isolation de ma maison et j’installerais des thermostats individuels pour baisser ou couper le chauffage dans les pièces inoccupées. J’installerais des thermostats programmables pour abaisser la température de 2ºC dans ma chambre pendant mon sommeil et dans tout le logement lorsque personne n’y est, et la faire remonter à la température de confort juste avant mon réveil ou mon retour à la maison. Je fermerais volets et rideaux dès qu’il fait nuit. J’éteindrais les lumières et les appareils électriques inutilisés. Je fermerais les robinets. J’installerais une chasse d’eau qui ne déverse que la quantité d’eau nécessaire. Je collecterais l’eau de pluie pour arroser, laver ma voiture…
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J’informerais mes amis, mes voisins et mes connaissances de ma prise de position, de mes actions, des résultats que j’obtiens sans jouer au missionnaire ni chercher à les culpabiliser ou à les convaincre à tout prix (agir ostensiblement et attendre leurs questions serait une bonne tactique), en espérant que d’autres, beaucoup d’autres m’emboîteront le pas. En effet, si je suis le seul à faire tout ce qui précède dans mon coin, ça n’aura pas beaucoup d’effet, mais si nous sommes des milliers, puis des millions, nous pouvons infléchir la tendance.
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Je voterais pour des politiciens qui me promettent la Terre, pas la Lune. •
J’informerais régulièrement mes élus de ma prise de position, de mes actions et des résultats que j’obtiens pour les encourager à encourager tout le monde à agir.
Et si j’étais… un gouvernement:
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Je taxerais lourdement le pétrole, tant sur les prix à la pompe que sur les revenus des compagnies pétrolières. J’appliquerais ainsi le principe du pollueur-payeur! Chacun paierait selon sa consommation, et les compagnies pétrolières cesseraient d’engranger de faramineux profits alors qu’elles sont des acteurs majeurs du réchauffement climatique et de bien d’autres pollutions. Avec ces taxes, je financerais les transports en commun jusqu’à les rendre plus efficaces et attrayants que l’automobile.
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Je taxerais également le charbon, les importations lointaines, les produits chimiques dangereux et les produits ayant un mauvais bilan carbone, ainsi que leurs producteurs. Avec ces taxes, je financerais la recherche sur les énergies renouvelables, les procédés industriels écologiques, les transports sans carbone et l’agriculture biologique, ainsi que leur application.
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J’imposerais lourdement les revenus des gros pollueurs, même s’ils ont délocalisé leur production ailleurs, et je leur restituerais cet argent en subventionnant leur conversion à des procédés de plus en plus écologiques, et leur taux d’imposition reviendra petit à petit à la normale, à mesure qu’ils approcheront les objectifs auxquels ils auront été astreints.
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Je fermerais les centres-villes à la circulation automobile. Ainsi, les transports en commun ne seraient plus freinés par des bouchons, l’air redeviendrait plus respirable, les rues seraient moins bruyantes et moins dangereuses. Il ferait bon s’y promener et y vivre…
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J’abaisserais les limitations de vitesse et je les ferais respecter. Cela ferait diminuer les émissions de carbone au kilomètre ainsi que le nombre, la gravité et le coût des accidents, donc aussi les coûts d’assurance.
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Je favoriserais la décentralisation et la diversification des activités industrielles et agricoles dans toutes les régions. Quand le pétrole sera hors de prix et que les transports deviendront eux aussi hors de prix, mes concitoyens et moi serons heureux de trouver une grande variété de produits dans notre région. Le temps des monocultures à grande échelle qui épuisent les sols sera révolu.
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Je bloquerais la construction de nouvelles centrales nucléaires. Même si l’énergie nucléaire a apparemment redoré son blason parce qu’elle serait peu émettrice de gaz à effet de serre, je n’oublierais pas que les mines d’uranium en émettent beaucoup et que les coûts de production globaux de cette énergie sont astronomiques. De plus, la prolifération du nucléaire multiplierait les risques d’accidents graves et épuiserait les ressources mondiales d’uranium en un temps record, ne laissant à nos prochains que des déchets dangereux dont le traitement n’a, malgré les promesses faites dans les années 1970, toujours pas évolué vers des solutions fiables et peu coûteuses à long terme.
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Je mettrais en pratique une politique de reboisement du type «qui coupe un arbre en replante trois» et je subventionnerais l’utilisation des bois locaux dans la construction et l’industrie, afin de relancer l’industrie forestière tout en captant beaucoup de carbone.
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Je subventionnerais la plantation de haies entre les champs. Cela favoriserait la biodiversité, protègerait les terres agricoles de l’érosion éolienne et pluviale, et capterait du carbone.
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Je lancerais des programmes pour réparer les dégâts. Il y a beaucoup à faire, et ça crée des emplois!
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Je rendrais obligatoire l’affichage du bilan environnemental (pas seulement carbone) sur tous les produits. Notre planète ne souffre pas que du réchauffement climatique, alors autant tout de suite prendre des mesures globales, parce que si nous vainquons le réchauffement, mais que nous perdons la bataille contre la 6e extinction de masse, nous disparaîtrons malgré nos efforts (Avez-vous lu le dernier rapport du WWF?
http://www.wwf.fr/vous_informer/rapport_planete_vivante_2016/#telecharger-lpr)
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J’informerais mes concitoyens de façon impartiale. Détenir de l’information donne du pouvoir, la partager donne à tous le pouvoir d’agir en connaissance de cause.
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J’informerais les gouvernements voisins et lointains, amis et autres de ma prise de position, en jouant au missionnaire et en cherchant à les culpabiliser et à les convaincre à tout prix, en espérant…
Certes, un tel programme politique est utopique et, dans l’état actuel des mentalités, je ne serais jamais élu nulle part, et quand la catastrophe se sera bien aggravée et que tout le monde sera enfin prêt à accepter une telle politique, il sera sans doute trop tard.
À moins que nous agissions tous en tant que consommateurs avertis dès maintenant?
Le mot-clé de notre survie, c'est la vie parce que nous ne mangeons pas de cailloux, alors tuons avec respect et discernement!