La fronde des élèves anti-masqueThomas Messias — 7 septembre 2020 à 7h20
Si les profs s'attendaient à une rentrée difficile, personne n'avait vraiment prévu que des groupes d'élèves puissent refuser de porter cet accessoire devenu obligatoire.
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Dans son lycée, Géraldine Lefebvre, professeure documentaliste, anime régulièrement des ateliers d'éducation aux médias. «J'en ai même proposé un à mes collègues, car une partie d'entre eux avait tendance à partager des infos plus que douteuses sur nos groupes de discussion. Preuve qu'il n'y a pas que les élèves qui peinent à séparer le bon grain de l'ivraie.»
Ces dernières années, elle a pu constater une augmentation du nombre de lycéen·nes nourri·es aux fake news. «Avant, on s'inquiétait surtout du fait qu'une partie des élèves n'était absolument pas au courant de ce qui se passait dans le monde. Depuis quelque temps, notre peur numéro un, c'est le fait que certains soient biberonnés aux fausses informations et aux élucubrations conspirationnistes.»
Pour elle, le fait que des groupes d'élèves antimasques se fassent connaître çà et là n'a hélas rien d'étonnant. «Avant, les élèves conspirationnistes nous disaient que le World Trade Center n'avait jamais été attaqué, ou que les Illuminati dirigeaient le monde. C'était déjà préoccupant, mais on pouvait en dialoguer, en atelier ou en dehors. Leur refus du masque s'inscrit dans la même lignée, sauf que cette fois, ça touche directement les établissements et la sécurité sanitaire.»
Si des groupes antimasque semblent s'être formés dans certains lycées, c'est aussi parce que les élèves concernés ont parfois été coupés du réel pendant près de six mois, poursuit l'enseignante: «D'habitude, on peut en raccrocher certains par le dialogue, leur démontrer que les théories auxquelles ils croient sont plus que farfelues. Mais là, des élèves ne sont pas venus en cours depuis la mi-mars. Passer une demi-année seul devant son ordinateur ou son smartphone, sans adulte de référence avec qui discuter de ces sujets, ça a des conséquences.»...
...«Ils représentent quoi, 5 ou 6% de nos effectifs... Ce n'est pas négligeable, mais ça reste gérable. En fait, c'est comme le Covid-19: il faut prendre le problème à la racine pour éviter qu'il ne s'étende. On va suivre ces élèves de près, parler avec eux, debunker les fausses infos et les faire rentrer dans le rang. C'est un chantier que je n'avais pas prévu, mai, on va s'y affairer. En fait, on s'y affaire déjà.»
http://www.slate.fr/story/194591/eleves ... irus-ecole