L'entreprise Colossal, fondée par l'entrepreneur Ben Lamm et le généticien George Church, entend réintroduire des mammouths laineux afin de restaurer des écosystèmes disparus.
Dans Jurassic Park, des manipulations génétiques permettaient de ressusciter des dinosaures. Trente ans plus tard, la biologie de synthèse existe bien pour venir à bout d'espèces envahissantes ou stopper l'extinction des espèces et la perte de biodiversité. Mais au-delà de ces objectifs, certains scientifiques ont d'autres ambitions.
Lundi, l'entreprise américaine Colossal s'est lancée le défi de voir à nouveau les mammouths laineux, espèce éteinte il y a 4000 ans, fouler le sol arctique à l'aide de techniques de manipulation génétique. "Colossal va lancer un modèle pratique et efficace de dé-extinction et sera la première entreprise à appliquer des techniques avancées de modification génétique pour réintégrer le mammouth laineux dans la toundra arctique", clame l'entreprise dans un communiqué. Elle est parvenue à lever 15 millions de dollars de fonds privés pour accomplir cet objectif qui est accueilli avec scepticisme par certains experts.
Des "mammouphants"
Créée par l'entrepreneur Ben Lamm et le généticien George Church, Colossal entend insérer des séquences d'ADN de mammouth laineux, collecté sur des restes préservés dans le sol sibérien, dans le génome d'éléphants d'Asie, afin de créer une espèce hybride. Les éléphants d'Asie et les mammouths laineux ont un ADN similaire à 99,6%, souligne Colossal sur son site Internet.
"Notre but est de créer un hybride mi-éléphant, mi-mammouth. En fait, il s'agirait plus d'un éléphant [génétiquement parlant] doté de nombreux traits du mammouth. Nous n'y sommes pas encore mais cela pourrait arriver d'ici quelques années", expliquait il y a quatre ans le professeur George Church au Guardian.
Cette créature, parfois appelée "mammouphant", serait en partie un éléphant, mais avec des caractéristiques propres au mammouth laineux, comme de petites oreilles, de la graisse sous-cutanée, de longs poils hirsutes ou du sang plus adapté au froid.
Pour stopper les effets du changement climatique
La création de ces pachydermes hybrides puis leur réintroduction dans la toundra doivent permettre "de restaurer des écosystèmes disparus qui pourront aider à stopper voire à inverser les effets du changement climatique", assure l'entreprise. Et ce, grâce au piétinement, aux excréments et à l'enracinement des créatures qui finiront par aider le paysage à revenir à son état antérieur, en théorie.
Les mammouths laineux génétiquement modifiés pourraient notamment "redonner vie aux prairies arctiques", qui permettent de capter le dioxyde de carbone et de supprimer le méthane, deux gaz à effet de serre, selon Colossal.
Les chercheurs espèrent produire des embryons de ces animaux hybrides dans quelques années, et finalement produire des populations entières, précise le New York Times. "Sur la base de la technologie disponible et de ce dont George [Church] est capable, nous aurions déjà des mammouths aujourd'hui si nous avions eu le bon montant de financement et si nous nous y étions concentrés au cours des cinq dernières années", affirme Ben Lamm au Texas Monthly.
Toujours cité par le Texas Monthly, Ben Lamm assure qu'une autre grande raison de fabriquer un nouveau mammouth est d'être à l'avant-garde d'une révolution biotechnologique. Mais il risque de se heurter à la défiance de la communauté scientifique.
https://www.lexpress.fr/actualite/sciences/ressusciter-le-mammouth-laineux-le-projet-fou-qui-inquiete-certains-scientifiques_2158388.html