Prévue à l'origine le 20 juillet 2013, puis le 1er octobre 2013, la taxe poids lourds ou ecotaxe est, pour l'instant, reportée au 1er janvier 2014. Elle s'appliquera à tous les véhicules de transport de marchandises de plus de 3,5 tonnes circulant sur le réseau national non-concédé (environ 10 000 km). Mais la mesure reste très contestée, surtout chez les agriculteurs. Mardi 22 octobre, ces derniers, aidés des transporteurs, organisaient une nouvelle journée de manifestation en Seine et Marne. Alors pourquoi cette taxe dérange-t-elle autant ? Décryptage.
En quoi consiste cette écotaxe ?
Son but est de taxer les camions français et étrangers qui transportent des marchandises sur les grandes routes gratuites françaises. A savoir 15 000 km de nationales et de départementales. Elle doit encourager à choisir des circuits de distribution moins longs et à opter davantage pour les trains et les péniches et moins pour les camions. Elle devrait rapporter 1,2 milliard d’euros par an, qui sera reversé aux collectivités locales et à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) et devra financer des projets de transports alternatifs à la route.
Qui doit la payer ?
La taxe sera payée par les transporteurs mais sera reportée sur la facture des bénéficiaires de ce transport. En clair, c’est celui qui passe la commande (le fabricant de jambon ou le supermarché, par exemple) qui assumera au final son coût, pas le transporteur par camion frigorifique. La taxe sera calculée en fonction du poids et du trajet des poids-lourds de manière automatique grâce à des boîtiers installés à l’intérieur des camions. Son montant dépendra également de la région traversée et sera fixé annuellement par décret. Ainsi, le coût du transport d’un jambon en Ile-de-France devrait d’abord être majoré de 6%, contre 3,30% en Bretagne mais pas en Corse, l’île échappant pour l’instant à la mesure.
Quand doit-elle entrer en vigueur ?
Question piège. Au départ, cette taxe a été décidée dans le cadre du Grenelle de l’Environnement en 2007. Elle doit alors entrer en vigueur en janvier 2011. Mais elle est repoussée à 2012, afin de permettre une expérimentation en Alsace. Expérimentation qui n’a pas lieu. A la fin de l’année 2012, le nouveau ministre des Transports, Frédéric Cuvillier, reprend le dossier. Il fait un pas vers les transporteurs, en acceptant le passage du tonnage autorisé des poids lourds de 40 à 44 tonnes. Il annonce également une simplification de l’éco-taxe et une entrée en vigueur en juillet 2013 – après, là encore, une expérimentation à réaliser en Alsace. Deux mois plus tard, le ministère annonce un nouveau report à octobre 2013 et l’annulation de l’essai alsacien. Avant, en septembre, de repousser une nouvelle fois la taxe au 1er janvier 2014. Officiellement, ce report est dû « au manque de préparation du dispositif et d’anticipation des difficultés sous le précédent gouvernement ». En fait, ce sont surtout les transporteurs qui tardent à s’équiper des boîtiers devant suivre les mouvements des poids lourds. Le 22 octobre, le ministre devait faire un point avec la presse sur la mise en place du dispositif à 11h30. Un point presse annulé une heure avant l’arrivée du ministre.
Pourquoi une telle grogne ?
Les transporteurs estiment que cette taxe pourrait faire grimper leurs prix de 4% à 8% en moyenne. Et s’inquiètent d’une baisse de leur activité. Les distributeurs, eux, dénoncent la hausse à venir de leurs charges puisque le montant de la taxe sera reporté sur leur facture. Certaines professions craignent les répercussions pour leur secteur, notamment le monde agricole qui estime que ses produits seront taxés plusieurs fois lors des différents transports entre les exploitations agricoles, les transformateurs agroalimentaires et les distributeurs. En Seine-et-Marne, des agriculteurs qui manifestent ce mardi estiment que cette taxe devrait entraîner une hausse de cinq centimes d’euros sur le prix d’une salade. Le ministère des Transports, qui rappelle que de nombreuses routes locales ne sont pas concernées par la taxe, précise lui que « comme la part moyenne du transport dans les prix aux consommateurs des marchandises est d’environ 10%, une majoration moyenne de 4,1% sur 10% ne sera que très peu perceptible ». N’empêche, les manifestants demandent... un nouveau report de la taxe.
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