Sans doute faut-il se livrer à une interprétation d'une terminologie particulière, cependant tout cela risque de rester un peu approximatif.
Les concepts de "riches" et "pauvres" ne sont, par exemple, pas liés à des valeurs absolues, mais relatives les uns vis-à-vis des autres...
Les biens consommés par les riches sont produits soit par des pauvres, soit des moins riches, que ce soit à l'échelle internationale ou à l'intérieur de l'Europe.
Le fait de se tourner vers les secteurs de service et d'abandonner l'essentiel des activités industrielles dans nos pays ne génère en soi pas de chômage, puisque, superficiellement, il s'agit de reconversion. Cependant, les gains de productivités du fait de l'informatique touche nombre de secteurs tertiaires, ce qui ruine cette adaptation évolutive...
Je trouve sa grille explicative singulièrement imprécise et ambiguë.
François Roddier, thermodynamique et société
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
Ahmed a écrit :Le fait de se tourner vers les secteurs de service et d'abandonner l'essentiel des activités industrielles dans nos pays ne génère en soi pas de chômage, puisque, superficiellement, il s'agit de reconversion. Cependant, les gains de productivités du fait de l'informatique touche nombre de secteurs tertiaires, ce qui ruine cette adaptation évolutive...
Certes,mais une reconversion bien naïve,une nation qui ne possède pas l'essentiel des modes de productions s'expose à la prolétarisation technologique.
La problématique de la tertiarisation résulte d'une certaine forme de mépris vis a vis des pays en voie de développement,dans les années 80, en France, nombre étaient les professeurs et chefs d'entreprise à prôner "les cerveaux en France et les muscles à l'étranger"...sans imaginer que les dits pays finiraient par nous supplanter en terme d'ingéniosité...vanité quant tu nous tiens!
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
Je me bornais à énoncer un fait, non à énoncer un jugement de valeur. Par ailleurs, tu connais assez mon point de vue pour savoir que je gauge ces stratégies transitoires à l'aune de leurs contradictions systémiques.
Je ne pense pas que la naïveté (bien réelle, évidemment) soit l'explication ultime: c'était, en réalité, la meilleure option possible pour optimiser la dissipation de l'énergie à un moment et dans une configuration donnée: il ne s'agissait donc pas vraiment d'un choix, mais d'un déterminisme thermodynamique.
Je ne pense pas que la naïveté (bien réelle, évidemment) soit l'explication ultime: c'était, en réalité, la meilleure option possible pour optimiser la dissipation de l'énergie à un moment et dans une configuration donnée: il ne s'agissait donc pas vraiment d'un choix, mais d'un déterminisme thermodynamique.
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
Ahmed a écrit :Je ne pense pas que la naïveté (bien réelle, évidemment) soit l'explication ultime: c'était, en réalité, la meilleure option possible pour optimiser la dissipation de l'énergie à un moment et dans une configuration donnée: il ne s'agissait donc pas vraiment d'un choix, mais d'un déterminisme thermodynamique.
Absolument, ce qui démontre bien que les dirigeants ne sont que des automates qui ne font qu’exécuter un "programme".
La notion de "programme politique" se doit d'être comprise de la façon correcte:une exécution mécanique visant à maximiser le rendement d'un système sur une période donnée.
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
C'est pourquoi le concept de "sujet-automate" rend parfaitement compte de cette situation ambivalente. C'est un oxymore qui permet de souligner la double dimension opposée des agents du système qui sont "libres" de se conformer au déterminisme du système.
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
L’effondrement est à nos portes
Hier, dimanche 1er mai, un ancien résistant français, Serge Lesou (90 ans) et sa fille Sylvie, mon épouse Claude (dont le père résistant est né à Odessa) et ma fille Mireille (Professeur à l’université du Michigan) se sont rendus à Odessa, à l’invitation de familles des victimes de l’attentat du 2 mai 2014. L’entrée dans la ville leur a été refusée. Ils ont dû passer la nuit à l’aéoroport. Merci de le faire savoir autour de vous.
Mais que peut-il se passer à Odessa pour que la présence, le témoignage d’étrangers soient redoutés?
Le 2 mai 2014 un rassemblement pacifique se tenait sur la place des champs Kulikovo, à Odessa, afin de récolter des signatures pour obtenir un référendum sur une organisation fédérale de l’Ukraine. C’est alors qu’une expédition terroriste de groupes de neo nazis de Pravy-sektor les ont agressés violemment, provoquant de nombreux morts parmi ces habitants d’Odessa. D’autres, pour échapper aux nervis neonazis se sont réfugiés dans la maison des syndicats qui a été encerclée, puis incendiée. Au moins 42 victimes supplémentaires ont péri par le feu ou en se défenestrant et ont été achevées par les assaillants.
En janvier 2015 une délégation des mères d’Odessa est venue en diverses villes de France pour informer en personne. Le 29 janvier elle était à Nice à l’invitation du Comité pour une Nouvelle Résistance. C’est lors de cette occasion que nous avons fait connaissance des membres de cette délégation.
Le 2 mai 2016 était le deuxième anniversaire de cet épisode dramatique auquel sont invités par ces amis ukrainiens : Serge, ancien résistant et Sylvie, sa fille, Claude et Mireille Roddier, fille et petite fille de Gleb Sivirine, commandant du célèbre maquis Vallier, maquis gaulliste qui a opéré dans le Var jusqu’aux combats de la libération. Gleb Sivirine étant né lui même à Odessa, elles profitaient de ce voyage pour retrouver le berceau de leurs origines familiales.
Des informations alarmantes nous avaient dans un premier temps convaincus de renoncer à notre participation à ces commémorations : Saakashvili et Poroshenko auraient mobilisé 1000 tueurs du bataillon Azov pour « maintenir l’ordre ».
Pour éviter tout prétexte à de nouvelles violences, les familles des victimes du massacre du 2 mail ont décidé de remplacer les commémorations publiques qui étaient prévues par des repas privés dans les familles. Seul étaient maintenu et autorisé par la mairie d’Odessa un moment de recueillement au cimetière devant les tombes des victimes.
Nos amis d’Odessa tenaient beaucoup à la présence de témoins étrangers et ont maintenu leur invitation. C’est donc à ces moments de recueillement privés que nous étions conviés.
Il semble donc que la présence, le témoignage d’étrangers soient redoutés puisque, visiblement attendus, nous avons été retenus à la frontière, et qu’après un interrogatoire de plus de 2 heures, nous avons été interdits de pénétrer sur le territoire ukrainien, et placés sous surveillance militaire dans l’aéroport d’Odessa. Nous avons dû passer la nuit dans des conditions très rudimentaires, allongés sur des banquettes en fer avec deux oreillers et deux couvertures pour quatre. Toujours « accompagnés » , confinés pendant les 3heures ½ de la correspondance d’Istanbul, nous avons été reconduits jusqu’à Nice – notre point de départ. Nos passeports nous ont été confisqués, remis directement dans les mains de la compagnie aérienne chargée de nous rapatrier. Ce n’est qu’arrivés à Nice que nous avons pu les récupérer des mains de la police française. Interrogés, escortés donc et privés de liberté pendant 21 heures.
aeroport
Nous avons donc été empêchés de nous recueillir sur les tombes des victimes de la tuerie du 2 mai 2014, empêchés d’apporter le soutien de Français et de partager avec nos hôtes, famille des victimes, un repas en privé.
Et dire que de tels comportements sont orchestrés par les autorités ukrainiennes qui bénéficient du soutien actif de l’Union européenne avec en première ligne la complicité de notre propre gouvernement et dans le silence assourdissant de la majorité de nos médias.
Serge Lesou, Sylvie Pillé, Mireille et Claude Roddier
http://www.francois-roddier.fr/?p=447#comments
Pour rappel le 2 Mai 2014 à eu lieu à Odessa un incendie criminel de nature assez trouble,lié au conflit Ukrainien:
L'incendie d'Odessa a eu lieu le 2 mai 2014 dans le cadre de l'agitation croissante en Ukraine au lendemain de la réussite du mouvement de l'Euromaïdan. Des affrontements entre les groupes pro-ukrainiens et pro-russes ont éclaté dans plusieurs rues d'Odessa1,2,3. Ils ont abouti à un important affrontement autour de la Maison des syndicats, un point de repère à Odessa situé sur le terrain Kulikovo dans le centre-ville4. Ce bâtiment a pris feu dans des circonstances obscures, entraînant la mort de quarante-deux militants pro-russes qui s'y étaient retranchés5. Du chloroforme6, entreposé dans le bâtiment pour une raison encore inconnue7, serait responsable de la mort des occupants. Si aucune arme à feu n'a été trouvée à l'intérieur du bâtiment, néanmoins des individus armés[Qui ?] situés sur le toit, et qui avaient donc accès au bâtiment, tiraient, possiblement sur la foule située en-dessous. Six autres personnes sont mortes dans les rues8 : ces évènements sont les affrontements civils les plus sanglants dans la ville depuis 19189.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Incendie_criminel_%C3%A0_Odessa
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
25 mai 2016Général
Cet article fait suite aux billets 89 et 90. J’y ai montré qu’on peut comparer l’état d’une économie à l’état d’un fluide défini par sa pression P et sa température T. Dans mon billet 49, j’avais étendu la notion de «température» à l’économie. Dans ma conférence du 12 mars 2015 (billet 75), j’ai montré que l’équivalent économique de la pression P est un potentiel de Gibbs que j’ai appelé le «potentiel économique» de la production.
P et T représentent des variables intensives. À chacune d’elles est associée une variable extensive appelée variable conjuguée. La variable conjuguée de la pression est le volume V tandis que la variable conjuguée de la température est l’entropie S. En économie, le volume V correspond à la quantité d’objet manufacturés, tandis que l’entropie S correspond à leur valeur monétaire. Le produit P.dV représente le travail mécanique nécessaire à la fabrication d’un produit, tandis que T.dS représente la monnaie échangée pour sa consommation.
Dans mon exposé du 12 mars 2015, j’ai identifié le produit P.dV à ce que les économistes appellent la demande, et le produit T.dS à ce qu’ils appellent l’offre. La conservation de l’énergie implique que l’offre équilibre la demande. Dans mes deux billets précédents, j’ai assimilé directement P à la demande et T à l’offre. Je continuerai à le faire, tout en gardant en mémoire que P représente alors l’intensité de la demande et T l’intensité de l’offre.
En physique, les variables P, V et T caractérisent l’état d’un fluide. Elles sont liées par une relation appelée équation d’état. Pour un gaz dit «parfait», cette relation s’écrit PV = RT, ou R est la constante des gaz parfaits. Pour un fluide réel, elle est assez bien représentée par l’équation de van der Waals qui est l’équation d’une surface du troisième degré dont une partie doit être remplacée par des isothermes rectilignes correspondant à la température de condensation (voir billet 89).
L’équation d’état d’un fluide exprime son volume en fonction de sa température et de sa pression. Le volume est la variable conjuguée de la pression. On aurait pu tout aussi bien choisir la variable conjuguée de la température qui est l’entropie. La raison de ce choix est qu’il est plus facile de mesurer des variations de volume que des variations d’entropie, la mesure de ces dernières nécessitant un calorimètre. Les mesures calorimétriques montrent que l’entropie d’un fluide peut être représentée par un point sur une surface tout à fait analogue à la surface de van der Waals. On retrouve en particulier la même zone de condensation à l’intérieur de laquelle le fluide apparait sous deux phases différentes.
Pour faciliter la compréhension de mes lecteurs, j’ai fabriqué un modèle en plâtre de cette surface. Sa photo est reproduite ici en deux exemplaires. Sur le premier exemplaire, les axes de coordonnées horizontales sont la pression P et la température T d’un fluide. L’axe de coordonnée vertical représente indifféremment son volume V ou son entropie S. On pourra utilement comparé cette surface à la partie située au voisinage du point critique de la surface reproduite sur le billet 89.
Sur le deuxième exemplaire, les axes de coodonnées horizontales sont le potentiel P de la production (marqué demande) et la température T de l’économie (marquée offre). L’axe de coordonnée vertical (marqué production) représente indifféremment le volume V de la production ou sa valeur monétaire M. Il est important de réaliser qu’un point de cette surface représente l’état de l’économie pour une production donnée. Certains produits peuvent être en phase de stagflation tandis que d’autres sont encore en phase d’expansion. L’état général de l’économie est alors une moyenne pondérée des états de l’ensemble de la production.
160525_PVt
On constate sur ce modèle que la valeur monétaire M de la production croît tout le long d’un cycle économique jusqu’à un point, situé au dessus de la falaise de Sénèque, à partir duquel cette valeur commence à décroître pour chuter ensuite brutalement le long de la falaise. Comme nous l’avons vu (billet 87), la décroissance commence lorsque l’état de la production franchit l’isotherme critique. À partir de là, le revenu du capital ne compense plus les dépenses et le capital décroit. La faillite peut se déclarer dès qu’on atteint le bord de la falaise de Sénèque.
L’analogie avec les fluides laisse à penser qu’on peut observer l’analogue d’un retard à la condensation. Il s’agit en effet d’une transition de phase abrupte et on sait que celles-ci nécessitent des germes de condensation. De même qu’un fluide peut rester un certain temps en état de surfusion, une économie peut rester en état d’endettement, aussi longtemps que les créanciers n’exigent pas leur dû. Ce n’est que lorsque ceux-ci réalisent qu’ils ne pourront pas être payés que les faillites se produisent en chaîne formant une cascade d’événements caractéristique des systèmes auto-organisés (billet 18).
À la manière d’un fluide qui se condense, une société qui s’effondre doit se réorganiser. De nouvelles structures se forment à petite échelle à l’intérieur desquelles des collaborations s’établissent. Cette restructuration implique une diminution d’entropie. Dans un moteur thermique, cette phase correspond à l’évacuation des gaz brulés. C’est la phase durant laquelle une machine à vapeur rend à sa source froide une partie de la chaleur qu’elle a reçue. Elle évacue une quantité d’entropie ΔS. Pour un fluide qui se condense, le produit T. ΔS représente la chaleur latente de condensation. C’est la chaleur qui est libérée par la condensation du fluide.
Dans une société, l’entropie évacuée se mesure en termes monétaires. Les flux monétaires étant de signe opposé aux flux d’entropie, cette évacuation d’entropie représente l’investissement d’un nouveau capital. C’est par exemple le capital nécessaire au développement de nouvelles ressources en énergie, ce qu’on appelle la transition énergétique. Ce capital à investir correspond à la chaleur latente de condensation. Son montant s’ajoute souvent à la dette impayée de la structure précédente. Cela rend les périodes de transitions très pénibles à traverser: ce sont des périodes de crises. Dans un prochain billet, je décrirai plus en détail ces différentes phases de l’économie.
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
93 – Les quatre phases de l’économie
29 mai 2016Général
Suite aux développements théoriques un peu aride des billets précédents, je propose à mes lecteurs de les illustrer brièvement à l’aide de mon expérience personnelle.
La première phase de l’économie que j’ai connue est une phase de crises, traversée dans ma petite enfance: l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale. Mes parents habitaient à la lisière de Paris, près du bois de Boulogne. Lorsque l’aviation alliée a attaqué les usines Renault de Boulogne-Billancourt, nous nous sommes réfugiés chez ma grand-mère dans le cinquième arrondissement. J’entends encore le son des alertes nocturnes et je me revois descendre à la cave avec mes parents. Le souvenir qui me reste de cette époque est l’espoir d’une libération proche, mais qui tarde toujours à arriver.
La phase de dépression qui a suivi a duré une dizaine d’années. Elle se caractérise par une demande très forte et une offre excessivement faible. La population, notamment dans les villes, manquait d’à peu près tout. Les tickets d’alimentation ont subsisté jusqu’en 1949. Peu à peu la situation s’est améliorée mais, en 1954, on s’inquiètait encore de la malnutrition au point que Mendès France a fait distribuer du lait aux enfants des écoles. Politiquement, ce fut une époque très instable, le gouvernement changeant parfois tous les six mois.
Le début de la phase d’expansion coïncide avec celui de la cinquième République. J’avais alors 22 ans. Il n’y avait ni mendiants ni chômeurs. Avec des salaires en constante augmentation, le pouvoir d’achat s’accroissait rapidement. Sur la surface de Van der Waals, cette phase de l’économie correspond à une isotherme à température élevée (voir deuxième figure du billet 90), ce qui se traduit par une offre élevée tandis que la demande, enfin satisfaite, tend à baisser.
C’est l’époque où, pour compenser cette baisse de la demande, la publicité a fait son apparition. On parlait alors de «réclame» et elle se limitait aux journeaux. Je ne saurais citer aucune publicité dans la rue antérieure à cette date. Les premières furent si frappantes que je m’en souvient encore. Cela allait de la plus banale: «Les piles Wonder ne s’usent que si l’on s’en sert», à la rangaine: «Du bo, du bon, Dubonnet», en passant par l’actualité: « Les Républiques passent, les peintures Soudée restent».
Il est clair que, pour un produit donné, la demande diminuait au fur et à mesure que le marché en était saturé, mais l’apparition constante de nouveaux produits innovants compensait largement ces baisses de demandes particulières en maintenant la demande globale. Dans mes précédents billets, j’ai traduit cela en disant que l’offre maintient la demande comme la température maintient la pression dans une chaudière. L’économiste français Jean Baptiste Say en avait conclu que l’offre créait de la demande. Dans son livre «l’ère de l’opulence», John Kenneth Galbraith fait le même constat.
La phase de stagflation est bien illustrée par l’économie actuelle. Le chômage est endémique. Les salaires sont à la baisse. Le pouvoir d’achat diminue régulièrement, à commencer par la partie la plus pauvre de la population. Cela se traduit par une demande trop faible en regard de l’offre. Alors que la production stagne, des hordes de poids lourds sillonnent nos autoroutes à la poursuite hystérique de clients potentiels. Sur la surface de Van der Waals, cela se traduit par une baisse de la pression et de la température de l’économie, baisse qui serait pourtant souhaitable d’autant plus que le climat se réchauffe et que nos ressources en énergie diminuent.
Une société humaine se trouve ainsi dans des situations économiques très différentes suivant la phase du cycle qu’elle traverse. Selon l’époque à laquelle il vit, un économiste va décrire des faits bien différents. Il pourra même aboutir à des conclusions opposées de celles qu’il aurait tirées s’il avait vécu dans une économie de phase opposée.
Adam Smith est considéré comme le premier grand économiste. Il a vécu en Angleterre dans une phase d’expansion. Il était donc naturel qu’il décrive une économie d’expansion. Il se trouve que c’est la plus simple car, située au dessus de la température critique, ses lois s’apparentent à celle des gaz parfaits. Sans savoir qu’il s’agit des lois de la mécanique statistique, Adam Smith les attribue à une «main invisible» qui fait que l’intérêt de chacun coïncide avec l’intérêt général. Il en déduit un peu hâtivement qu’il s’agit d’une loi générale et en fait la base du «libéralisme économique».
On sait aujourd’hui qu’on ne peut mathématiquement optimiser un ensemble en optimisant individuellement chacune de ses parties (voir billet 2). Les principes du libéralisme économique sont donc viciés à la base. Il est facile de s’en rendre compte en considérant une économie dans la phase opposée, pour laquelle la «température économique» est en dessous du point critique.
Nous avons vu que c’est une économie de crises durant laquelle la société passe brutalement de l’abondance à la pénurie et s’endette. Karl Marx a connu une telle phase et l’a décrite mieux que tout autre. Il est clair qu’en période de pénurie, découvrir une source de biens matériels, sans la partager avec les autres, satisfait l’intérêt particulier sans satisfaire l’intérêt général, ce qui contredit Adam Smith. Même les insectes le savent et partagent entre eux l’information!
L’analyse de Marx a conduit au communisme, une attitude radicalement opposée à celle du libéralisme. Elle a divisé le monde en deux blocs qui se haïssent mutuellement. N’est-il pas grand temps de réaliser qu’il s’agit seulement de réponses à des phases très différentes de l’évolution économique et d’agir en conséquence?
Restent enfin les deux phases intermédiaires que sont la dépression et la stagflation. Elles sont souvent confondues car toutes deux sont des phases de stagnation de l’économie. La première est une phase de stagnation dans la pénurie tandis que l’autre est une phase de stagnation dans l’abondance.
Si l’on cherche à affecter le nom d’un économiste à ces phases, le nom de John Maynard Keynes vient immédiatement à l’esprit. Il a traversé et théorisé la grande phase de dépression de 1929. L’apport essentiel de Keynes a été de montrer que l’économie ne s’auto-régule pas comme on le croyait jusque là et qu’une intervention gouvernementale peut être nécessaire. Il n’a malheureusement pas distingué clairement la dépression de la stagflation.
Un simple regard à la surface de van der Waals, reproduite à nouveau ici, montre la politique à adopter. En cas de dépression, il faut agrandir la taille du cycle économique ce qui implique d’internationaliser les échanges. C’est ce qui a été réalisé avec succès après la dernière guerre mondiale en créant la communauté européenne du charbon et de l’acier. En cas de stagflation, il faut au contraire régionaliser l’économie de façon à diminuer la taille du cycle et passer au plus près du point critique. On n’évite pas la crise mais on en minimise l’impact en réduisant la hauteur de la chute.
On retrouve ainsi la stratégie d’alternance entre les grandes structures et les petites structures que l’évolution biologique suit naturellement avec la sélection r et K. L’évolution culturelle est malheureusement beaucoup plus rapide et l’homme a encore du mal à s’y adapter. Il tend à réappliquer les méthodes qui ont eu du succès dans une certaine phase de l’économie à une phase qui est maintenant son opposée. Ce faisant, il court régulièrement à la catastrophe. Cela fait partie de son apprentissage.
L’Amérique du Nord et à sa suite l’Europe sont aujourd’hui en stade de stagflation. Un coup d’œil à la surface de van der Waals montre qu’on ne peut maintenir la croissance économique qu’en longeant la falaise de Sénèque de plus en plus loin du point critique. C’est ce qu’on fait en internationalisant l’économie. C’est ce à quoi conduira tout traité transatlantique. Mais plus on s’éloigne du point critique plus la hauteur de la falaise augmente et plus la chute sera catastrophique.
Or cette chute est inévitable, car nos ressources énergétiques sont finies. Il serait donc beaucoup plus sage de régionaliser l’économie, mais cela implique une décroissance économique, donc des dettes à résorber. Peu d’économistes sont prêts à l’accepter, encore moins à le suggérer. Rappelons seulement que les romains se sont trouvés devant la même situation. Ils n’ont pu maintenir leur économie qu’en étendant continuellement leur empire. On en connait le résultat. L’occident à mis des siècles à s’en remettre. Cette fois l’effondrement risque d’être beaucoup plus grave car la taille des populations et des énergies mises en jeu sont beaucoup plus importantes. Qu’on se le dise.
http://www.francois-roddier.fr/?p=471#comments
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
Un diaporama très intéressant(comme toujours)de François Roddier sur le devenir de notre civilisation aux travers des lois de la thermodynamique.
Les grand principes de la thermodynamique économiques y sont exposés de façon claire et synthétique:
http://francois-roddier.fr/Avignon.pdf
http://francois-roddier.fr/Avignon.swf
Les grand principes de la thermodynamique économiques y sont exposés de façon claire et synthétique:
http://francois-roddier.fr/Avignon.pdf
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Re: François Roddier, thermodynamique et société
La thermodynamique fournit un cadre large, logiquement compatible avec d'autres grilles de lecture plus fines, mais moins globales. Autant ses considérations d'ensemble sot pertinentes, autant ses conclusions sont ambigües et vagues.
En effet, après avoir longuement insisté sur les déterminismes conduisant à la dissipation de l'énergie dans la totalité de l'ordre universel, F. Roddier nous enjoint à la décroissance!
Ceci constitue, au minimum, une contradiction logique, même si des considérations dialectiques (un peu acrobatiques et nullement intuitives) permettent d'outrepasser ce problème (consommer moins pour consommer plus longtemps, pourrait-on dire en manière de raccourci); mais ce n'est pas le plus grave et j'ai déjà eu l'occasion d'aborder le point suivant: se concentrer sur l'aspect quantitatif d'une croissance conçue comme antithèse du paradigme dominant, c'est se situer dans les catégories que l'on prétend combattre et surtout, une décroissance énoncée intransitivement laisse place à un flou artistique qui désamorce complétement son potentiel critique. Il faut considérer que dans la crise de la modernité tardive que nous connaissons, rien ne s'oppose à une décroissance de la production des biens physiques (elle est même inévitable, en pratique) qui, selon certains pourrait s'accompagner d'une croissance de l'accumulation de la valeur abstraite (ce qui satisferait au critère de fonctionnement du capitalisme), moyennant la réinjection de travail humain abstrait. Personnellement, je suis assez sceptique quant à la possibilité de cette évolution et je pencherais plutôt pour une limitation mécanique des biens produits et leur accaparement par une ultra-minorité agressive.
Ce concept de "décroissance" est donc fortement minée et constitue moins une alternative au capitalisme qu'un énième plan de sauvetage. Une réelle émancipation devra abandonner radicalement les catégories capitalistes et donc cesser de se focaliser sur les questions quantitatives et de répartition qui enferment dans un cercle vicieux.
En effet, après avoir longuement insisté sur les déterminismes conduisant à la dissipation de l'énergie dans la totalité de l'ordre universel, F. Roddier nous enjoint à la décroissance!
Ceci constitue, au minimum, une contradiction logique, même si des considérations dialectiques (un peu acrobatiques et nullement intuitives) permettent d'outrepasser ce problème (consommer moins pour consommer plus longtemps, pourrait-on dire en manière de raccourci); mais ce n'est pas le plus grave et j'ai déjà eu l'occasion d'aborder le point suivant: se concentrer sur l'aspect quantitatif d'une croissance conçue comme antithèse du paradigme dominant, c'est se situer dans les catégories que l'on prétend combattre et surtout, une décroissance énoncée intransitivement laisse place à un flou artistique qui désamorce complétement son potentiel critique. Il faut considérer que dans la crise de la modernité tardive que nous connaissons, rien ne s'oppose à une décroissance de la production des biens physiques (elle est même inévitable, en pratique) qui, selon certains pourrait s'accompagner d'une croissance de l'accumulation de la valeur abstraite (ce qui satisferait au critère de fonctionnement du capitalisme), moyennant la réinjection de travail humain abstrait. Personnellement, je suis assez sceptique quant à la possibilité de cette évolution et je pencherais plutôt pour une limitation mécanique des biens produits et leur accaparement par une ultra-minorité agressive.
Ce concept de "décroissance" est donc fortement minée et constitue moins une alternative au capitalisme qu'un énième plan de sauvetage. Une réelle émancipation devra abandonner radicalement les catégories capitalistes et donc cesser de se focaliser sur les questions quantitatives et de répartition qui enferment dans un cercle vicieux.
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