François Roddier, thermodynamique et société

[sen-no-sen]

Il ne tire son prestige actuel que de son inutilité (dépense d'énergie non indispensable, par des urbains qui se déplacent spécialement pour "bénéficier" des conditions de la contrainte), du coup, par mimétisme, les gens du cru se sont mis au diapason...

Tu as bien trouver le terme que je cherchais:inutilité!
C'est effectivement le "fin du fin" que de pratiquer des choses inutiles.
On retrouve cette logique dans de bien nombreux domaines...
En ses fêtes de "faim d'années" on pourrait par exemple cité l'exemple du foie gras ou du saumon.
Manger de tel mets est totalement stupide,d'une part c'est une aberration nutritionnelles, de l'autre c'est une catastrophe écologique(gavages des oies ,"dopage" des saumons etc...).

La traduction de tout cela est simple:pratiquer quelque chose d'inutile signifie que l'on est suffisamment dominant pour ne pas se soucier du quotidien,chose qui revient au classes les plus défavorisé.

Un bel exemple était celui des "pieds bandés" des femmes de la bourgeoisie Chinoise pendant 10 siècles.
Se bander(déformer) les pieds démontrait aux yeux des autres que l'on n'avait pas la nécessité de faire des travaux de forces ou des taches ménagères,privilège qui revenait aux classes les plus favorisés.
On avait donc ici un exemple subtile des processus thermodynamique avec une dichotomie entre nature et culture:dans la nature avoir des membres sains favorise l'efficacité physique et donc la survie,et par extension la dissipation d'énergie.
Mais dans la société,avoir des pieds bandés (et donc peu performant) démontre aux autres que l'on est un dominant...et que, par extension l'on dissipe plus d'énergie mais cette fois ci par le biais d'une symbolique(bien matériels,argents etc...)

[Ahmed]

Un autre exemple dans la même civilisation, est celui des ongles démesurément longs des lettrés et mandarins qui témoignaient de leur distance vis-à-vis des activités triviales.

Une illustration actuelle de ce phénomène s'observe dans l'appréciation des biens (et des fonctions!): ce qui est utilitaire voit son prix se déterminer par rapport à son utilité, ce qui est de l'ordre somptuaire échappe à cette limitation et son prix participe à son prestige dans une sorte de mise en abyme...

[Ahmed]

Je viens de finir la lecture du "Principe de Lucifer": un peu longuet, pas inintéressant au demeurant.
L'écueil de ce genre de grille explicative purement formaliste et scientiste, sont ses limites, vite atteintes.
Il est assez amusant de voir qu'il est facile d'expliquer l'idéologie sous-jacente de l'auteur grâce au schéma sociobiologique qu'il défend!

L'économie ne tient pas une très grande place dans son schéma et le rôle des Etats-Unis est très idéalisé positivement (au contraire de l'Islam).
On peut donc lui reprocher de ne pas questionner un seul instant les catégories du même dominant, mais cela est cohérent avec une démarche purement formelle...

Si l'histoire revisitée par Bloom (à grand renfort de références) propose une synthèse assez stimulante (bien que partiale), en revanche, l'analyse de la période contemporaine est franchement décevante par sa grande pauvreté; c'est d'autant plus regrettable que l'on serait volontiers portés à l'indulgence sur certains arrangements avec le passé, si l'auteur proposait un éclairage incisif de la période actuelle: mais la radicale nouveauté de la situation lui échappe totalement.

Au final, F. Roddier propose une grille explicative plus large, plus englobante et intellectuellement beaucoup plus fertile que celle de Bloom.

[sen-no-sen]

Je viens de finir la lecture du "Principe de Lucifer": un peu longuet, pas inintéressant au demeurant.

Ah! bonne chose!
F.Roddier mentionne H.Bloom dans thermodynamique de l'évolution.
Il en est également question dans le livre de J.P Baquiast "Pour un principe matérialiste fort".
http://philoscience.over-blog.com/article-dialogue-avec-howard-bloom-48255130.html

Les idées développés par H.Bloom sont très intéressantes ,quoique, au vu des travaux de F.Roddier assez empirique.
Ce qu'il nomme "principe de Lucifer" n'est ni plus ni moins qu'une interprétation des lois de la thermodynamique appliqué au vivant.

Il est assez amusant de voir qu'il est facile d'expliquer l'idéologie sous-jacente de l'auteur grâce au schéma qu'il défend!

Effectivement,on reconnais une idéologie libérale pro-américaine violemment anti-islamique,avec une certaine dose d'amnésie concernant les méfaits des USA...
La fin du livre est très emblématique de la vision Luciférienne qu'il défends et que partage un certain nombre de ses homologues américains comme R.Kurzweil par exemple,selon eux, l'humanité n'a d'autre choix que de s'orienter vers une course en avant technologique visant a transformer l'homme et le monde...
La vision de François Roddier est en ce sens très différente!

[Ahmed]

Oui, j'avais bien noté cette fuite en avant, simple conséquence de son acceptation sans nuance des catégories de l'hyper-société...

[jean.caissepas]

Le bon vieux baratin montagnard a fait place aux bars-à-ski, et le bucolique à la course au fric: Avec des youpies de plus en plus enluminés d'équipements et de vêtements fluo et s'enorgueillissant de chevelures peroxydées. Tout en arborant le dernier smartphone à la mode qui leur permet d'illustrer leurs exploits sur les pistes en les affichant à la nanoseconde près sur le web sous forme de "selfies échangés en direct" non sans une certaine vanité...

Bonne remarque de notre amis Obamot !

Je suis adepte de snowboard, non pas pour les pistes mais pour les hors pistes qui me permettent de mieux entrer en contact avec la nature sauvage de la montagne en hiver.

Je surfe avec de vieux vêtements encore chauds qui m'évitent des engelures, et de pleurer à chaque fois que je les abimes.

Etre loin du monde dans la neige vierge me permet de rêver un peu et surtout d'admirer la beauté de la nature que l'on oublie dans notre vie d'employés stressés par les exigences de performance que nos directeurs savent bien nous marteler à longueur de semaine.
Il faut bien qu'ils fasses du chiffre pour payer leurs vacances aux Seychelles ou à Bali...

Je suis issu d'une famille de paysan, né à la campagne avec des souvenirs inoubliables de couchés de soleil de fin d'été, éreinté après une journée à ramasser la paille ou le foin...

Les sport d'hivers et les vacances d'été sont un palliatif à notre mal-être quotidiens à exercer une profession dont l'utilité n'est pas certaine, mais qui fait partie du système actuel de complexification exponentielle des demandes et donc des soit disant "besoins" de nos clients.
Si les demandes de nos clients étaient "simples", ils se sentiraient ou seraient considérés comme "dépassés" par la complexité ambiante et donc mettraient en péril leurs rôles de décideurs vis à vis de leurs employeurs.

Cette folie ambiante de complexification croissante noie tout le monde dans un surcout de toute action qui "paralyse" la société actuelle par le fait que la "croissance" permettant de payer l'augmentation de la complexité n'existe plus !

J'ai une vielle voiture (306D) qui pollue, mais qui contient très peu d'électronique et que je peux entretenir moi-même en grande partie.
Les voitures modernes, bourrées d'électronique, ne m'inspirent pas car elles sont fragiles et leur réparation est faite exclusivement en concession avec un surcout que j'estime indescent.

Nous sommes malheureusement poussés par les publicités qui nous ressassent en boucle d'être "PERFORMANT" (exemple : des crèmes à raser performantes !!! : Faut il gagner 2 10ieme de seconde au rasage ?)

La performance va avec cette complexicification de notre travail et de notre société, pour que l'on en comprenne que le minimum et que l'on soit des robots bien obéissant au travail et dans la société (radars, permis à points, ...).

Les stations de sport d'hiver et les vacances d'été nous sont donnés comme une cour de récréation pour que l'ont "respire" et que l'on ne craque pas (tous le monde va te dire en rentrant :Tu t'es bien reposé et détendu, tu doit être en pleine forme pour rattaquer le boulot à fond !)

Société de dupe !

Après on s'étonne que la jeunesse n'ait pas envie de rentrer dans la vie active...

Un joyeux noël malgré mon humeur !

[sen-no-sen]

Merci de ton témoignages jean.caissepas.

Etre loin du monde dans la neige vierge me permet de rêver un peu et surtout d'admirer la beauté de la nature que l'on oublie dans notre vie d'employés stressés par les exigences de performance que nos directeurs savent bien nous marteler à longueur de semaine.

Ce passage est très parlant de l'état de notre société moderne:pour échapper a l'aliénation que nous impose le système anthropotechnique chacun tente de s'en échapper par différent moyen,le tourisme étant une solutions comme une autre et propre a certaine classes.
Il s'agit d'une façon à peine déguisé d'une stratégie de fuite...le souci c'est que celle ci n'est pas pleinement réelle,puisqu'elle s'opère a l'intérieur d'un système qui les pilotent.
Autre problématique,celle ci ne peut être réalisé que par un accroissement des pressions sur les écosystèmes...
En somme en voulant échapper au système,on ne fait en réalité que le renforcer...

Les stations de sport d'hiver et les vacances d'été nous sont donnés comme une cour de récréation pour que l'ont "respire" et que l'on ne craque pas (tous le monde va te dire en rentrant :Tu t'es bien reposé et détendu, tu doit être en pleine forme pour rattaquer le boulot à fond !)

Effectivement,le tourismes et les congés payés ont, entre autres que de doper la croissance et faire dépenser l'argent des salariés,le but de renforcer le réflexe Pavlovien:bien bosser=bonnes récompenses.
L'ennui c'est que le concept du village Potemkine ne marche pas très longtemps,lorsque que l'effondrement économique survient,le peuple mettra de coté sa ration de soma ...

[Ahmed]

Consommer des vacances (qui ne sont que le travail des autres) constitue le bouclage du cercle: le surplus de la rétribution du travail de production est recyclé dans le travail de consommation* (qui est son pendant).

Je reviens sur "Lucifer": il semble que pour Bloom, les islamistes (chez lesquels il ne s'embarrasse pas d'opérer quelques distinguos), constituent un mème opposé à celui de l'Occident, d'où la guerre larvée entre les "doux américains" et les "barbares mahométans" (sic!).
Pourtant, à y regarder de près, c'est bien au contraire l'impossibilité de faire partie du mème dominant (par refus de l'Occident**) que ce sont développées ces aspirations à notre modèle, sous un travestissement religieux identitaire.

*C'est un concept qui éclaire l'ensemble de la scène: un travail engendre une marchandise, un autre travail le change en valeur et un dernier détruit la marchandise (mais non la valeur!), pour que le cycle boucle à l'infini et qu'à chaque tour, la valeur s'accumule...
**Et aussi par impossibilité physique (renforcée par le refus du partage).

[sen-no-sen]

Je reviens sur "Lucifer": il semble que pour Bloom, les islamistes (chez lesquels il ne s'embarrasse pas d'opérer quelques distinguos), constituent un mème opposé à celui de l'Occident, d'où la guerre larvée entre les "doux américains" et les "barbares mahométans" (sic!).
.

L'islam tout comme le christianisme est un super-organisme mémétique.
Compte tenu du fait que la religion musulmane est la plus jeune des religions du livre,il est en somme assez logique qu'elle opère(1) une contre offensive vis a vis de sa concurrente la plus directe(2):l'idéologie libérale techno-scientiste américano-sioniste.
Pour les djihadiste,l'ennemi est tout trouvé...et pour le pentagone aussi!

En réalité, et c'est là que j'ai été très déçu de H.Bloom,c'est qu'il n'a pas été capable d'appliquer sa propre grille,car le super-organisme antropotechnique,le "système"donc,utilise le "principe de Lucifer" pour opérer sa énième mu via l'antagonisme Islam/occident,tout "il" l'avait fait entre capitalisme et communisme...

Je m'explique:c'est historiquement les USA,via leurs essors(et donc via leurs dissipations d'énergie) qui ont mis en place les régimes islamiques fondamentalistes(Iran,Iraq,Libye en sous traitance et Syrie).
Le chaos généralisé a fortement favorisé l'essor du messianisme musulman et de fait la lutte armée.
En réponse de quoi les USA et leurs alliés ripostes par le biais du technologisme,ce qui a permis une augmentation de la puissance du complexe militaro-industrielle,ainsi qu'a une réduction des libertés individuelles, permettant d'asseoir à tout les niveaux de l'échiquier les mèmes du "système"....

(1) l'Islam est doté d'une doctrine politique beaucoup plus totalisante que ne le fut le Christianisme par ex(qui fut également entièrement récupéré...).
Un grand nombre des préceptes de l'Islam sont très "terre à terre" et vise à l'organisation de l'Oumma.
De ce point de vu là l'Islam est nettement moins compatible d'avec des idéologies qui concours sur le même sujet quelle,ce qui favorise les conflits.
De plus l'Islam est comme le Judaïsme et le Christianisme, contaminé par le messianisme,et les messianismes ont la fâcheuses tendance à vouloir s'affronter(il ne peut en rester qu'un!),et manque de bol pour nous, le "Système"est lui aussi messianique...

(2)Je considère l'idéologie dominante comme une religion matérialiste.

[Ahmed]

Je suis entièrement d'accord avec le début de ton message, c'est sur la fin que je serais plus nuancé.

Si l'on fait abstraction de l'aspect gouvernemental des nations musulmanes "remuantes", je pense qu'il existe un affrontement idéologique interne entre les deux religions: islam/"modernité*" et que c'est l'agressivité économique de l'occident qui, en détruisant la possibilité d'effectuer les mutations souhaitées (dans le sens de la seconde) entraîne un report compensatoire sur la première**.
Si l'on y ajoute l'agressivité militaire de l'Occident qui a lui-même besoin d'un abcès de fixation en dehors de son territoire, tous les ingrédients du cocktail sont réunis...
Il y a une autre raison à cette agressivité: les régimes autoritaires mis en place par les occidentaux ont tendance à restreindre les flux économiques Nord/Sud à l'intérieur du cercle étroit d'une petite oligarchie clientéliste ou tribale.
De ce point de vue, une démocratie formelle sera beaucoup plus efficace quant au volume et à la vitesse du flux économique***, d'où les printemps arabes...

*Sous-entendu: occidentale!
**C'est le même phénomène que l'on observe dans les banlieues française et qui dirige les jeunes vers une religion qu'ils ne pratiquaient pas auparavant.
***Ou, dissipera une plus grande quantité d'énergie, comme le dirait Roddier.