Concernant le fait d’aller chercher des poches géothermiques profondes, vous oubliez un détail : outre les difficultés liées au forage, il faut encore que l’eau parvienne à rester chaude le temps d’arriver à la surface… Un tuyau de plusieurs kilomètres ça fait un sacré radiateur !
grelinette a écrit :les « avantages minimes » qu’on en tire, à savoir ne chauffer de l’eau qu’à quelques centaines de degrés, si je puis dire !
D’ailleurs, savez-vous quelle température provenant de réaction nucléaire est réellement utilisée pour chauffer l’eau qui va actionner les turbines en fin du processus pour produire l’électricité ?On trouve sur internet quelques valeurs,
de l’ordre de 300 à 400 degrés dans le circuit primaire, c’est à dire le circuit dont l'eau va récupérer directement la chaleur produite par la réaction nucléaire, (
Cf. le site d’EDF) …
alors que la réaction nucléaire est capable de produire quelques 15 000 000 de degrés Celsius. (On "joue" avec quinze millions de degrés pour en utiliser 300 !
).
L’eau est chauffée à 330°C environ.
Elle circule en circuit fermé entre le réacteur et les échangeurs (générateurs de vapeur). Dans les échangeurs elle refroidit à environ 290° (si ma mémoire est bonne), puis repart dans le réacteur.
L’ensemble du circuit est maintenu sous une pression de 3 bars pour que l’eau reste à l’état liquide.
Tu parles de la fission nucléaire comme d’une flamme dont on n’utiliserait qu’une petite partie de la chaleur ; ce n’est pas ainsi qu’il faut voir les choses.
Une flamme a besoin d’une température minimale pour être entretenue. La fission nucléaire se produit quelle que soit la température.
Si le combustible est complètement isolé, la température peut monter à des niveaux extrêmes parce que l’énergie produite reste sur place. C’est ce qui se passe dans une bombe.
Si on prélève cette énergie, on empêche la montée en température. C’est ce qui se passe dans une centrale.
La température est stable quand la puissance prélevée est égale à la puissance produite par la réaction.
Dans une centrale électrique, la puissance prélevée est liée à la demande du réseau, c’est une consigne. Il faut donc adapter la puissance de la réaction nucléaire en permanence pour que la température du circuit reste stable.
La puissance de la réaction est contrôlée par l’absorption de neutrons, à l’aide de bore dilué dans l’eau du circuit primaire et de barres de graphite entre les éléments combustibles. Plus on absorbe de neutrons, moins il en reste pour entretenir la réaction.
Quand on absorbe plus de neutrons que la réaction n’en produit, celle-ci ralentit (on dit qu’elle converge).
Quand la réaction produit plus de neutrons qu’on n’en absorbe , elle accélère (on dit qu’elle diverge). Dans cette situation il faut réagir vite sous peine de voir la réaction s’emballer.
C’est pour cette raison qu’il y a un moyen de régulation lent (concentration de bore dans l’eau) et un moyen de régulation rapide (enfoncement des barres de graphite dans le réacteur).
Précision au passage : on pourrait contrôler la réaction uniquement avec les barres de graphite, le problème c’est qu’elles causent une usure irrégulière des éléments combustibles (ceux du haut sont quasiment toujours entourés par les barres, ils ne s’usent quasiment pas, alors que ceux du bas ne le sont presque jamais sauf quand le réacteur est à l’arrêt). Donc ils choisissent plutôt de régler la puissance moyenne grâce à la quantité de bore et de ne bouger les barres de graphite que pour les variations à court terme.
Je te rassure, la disposition des éléments d’uranium dans le réacteur fait qu’un emballement n’est pas possible : même si la réaction diverge fortement, on sera toujours capable d’absorber plus de neutrons qu’elle ne peut en produire.
Là où ça devient embêtant, c’est quand on ne refroidit pas assez et que le réacteur commence à fondre. Parce que du coup on se retrouve avec de gros amas d’uranium fondu qui ne sont plus traversés par de l’eau borée ou par du graphite. On risque donc de ne plus pouvoir réguler la réaction : elle diverge librement et c’est la catastrophe (Fukushima, Tchernobyl).
La quantité de combustible à rassembler de manière compacte pour que la réaction diverge sans contrôle possible est appelée masse critique. Elle dépend du type de combustible (pour l’uranium 235 par exemple c’est 48 kg).
Plusieurs petits blocs stables qui sont soudain écrasés les uns contre les autres (à l’aide d’une détonation par exemple) permettent donc d’atteindre cette masse critique. C’est ainsi qu’on allume une bombe A.
Bon je me suis un peu éparpillé, mais tout ça c’est pour dire qu’il n’y a pas de gaspillage dans un réacteur :
-l’eau n’est certes pas chauffée très fort mais son débit est énorme, la puissance de la chaudière est donc élevée
-la réaction est contrôlée et donc ralentie, mais du coup elle peut durer plus longtemps (exactement comme une batterie) : toute l’énergie disponible est donc bel et bien utilisée au final
(Enfin ce n'est pas tout à fait exact car on remplace le combustible bien avant qu'il soit devenu complètement inactif évidemment)
Une remarque sur le rendement :
Un réacteur à eau pressurisée de type P4 (par exemple) produit une puissance thermique de 4500 MW. La puissance électrique en sortie est de 1300 MW. Le reste est réparti en pertes thermodynamiques (rendement des turbines), pertes thermiques (isolation des tuyauteries) et consommation de la centrale elle-même (pompes, servitudes etc)