par humus » 01/02/22, 08:01
Synthèse sur ces 2 vidéos au sujet de la prospective sur le siècle en cours (effondrement ?) et les manières de vivre tout ça au mieux. Les approches d’ Arthur Keller et de Jorgen Randers sont similaires, les conclusions sont sensiblement différentes.
Arthur Keller constate que la civilisation humaine croit pour son bien être et transforme la nature en déchet.
Cela ne peut être éternel et nous avons déjà dépassé les capacités de renouvelabilité de la nature.
Ce fait ne peut mener qu’a un effondrement écologique au sens large et donc à un effondrement brutal de la population mondiale courant du 21 e siècle. C’est la conclusion du rapport « limits to growth » , scenario BAU, de 1972.
Face à ce constat, il bascule dans une démarche d’adaptation pour gérer cela au mieux.
Pour la résolutions des problèmes, il insiste sur la nécessité de sortir des modes de raisonnement habituels des experts , dit "en silo", pour basculer vers une vision élargie, vers une vision systémique .
Ces deux approches, expertise "en silo" et expertise systémique sont nécessaires et complémentaires.
Il préconise de cerner la cause des problèmes pour agir au niveau de la cause, plutôt que sur le symptôme comme nous le faisons bien souvent actuellement.
Je ne l'entends pas envisager une sortie globalement positive pour la société mondiale
A ce que je perçois de son discours, il propose d’entrer en résistance face a ce qui se dessine :agir selon ses convictions profondes contre le système actuel.
Il est plus orienté "action individuelle" mais en lien, au travers de communautés résilientes, ayant compris ce qui se passe au niveau du système terre et agissant intelligemment.
A la fin, il égrène un tas de préconisations de bon sens tournant autour de la résilience : redondance, stock, culture du risque, mutualisation, coopération etc..et enfin introduit les low -tech.
Jorgen Randers est un des rédacteurs du rapport original Limits to growth de 1972.
Premier constat, il n’y a pas eu d’effondrement pensant les 50 années écoulées depuis la sortie du rapport de 1972.
La question se pose pour les 50 années suivantes .
Avec une équipe, il vient de travailler 10 ans a l’élaboration d’une nouvelle modélisation informatique du système terre, Earth4, qui succède à Worl3 de 1972.
Ce nouveau model intègre le paramètre CO2 , et fait de la prospective à partir de 2020 au lieu de 1970 dans le rapport initial.
Actuellement Les énergies fossiles carbonées sont finalement moins épuisées que prévu dans World3, la population mondiale est supérieure a ce qui était prévu, la pollution (CO2) est supérieure a ce qui était prévu, le reste colle assez bien aux simulations de 1970.
Avec Earth4 un pic de population mondial à 9 ou 10Mds est atteint vers 2050, sans effondrement brutal ensuite , contrairement aux modélisations dans world3 en 1970.
Cela est possible par des mesures de progrès amenant à une réduction des naissances par les femmes elles mêmes : éducation , contraception, , soins de santé, et l’amélioration des revenus.
Par contre dans Earth4, l’indicateur de bien être mondial ne fait que décroître sur les 50 années a venir car les si le revenu mondial augmente encore un peu, les inégalités augmentent fortement.
En plus clair, le capital s’en sort mieux que les travailleurs.
Dans Earth 4, le bien être humain chute à cause des inégalités et à cause du réchauffement climatique. Le réchauffement climatique ne tue pas forcement directement mais dégrade fortement la qualité de vie.
Pour que le bien être humain ne s’effondre pas dans les 50 années a venir, il faut que les riches payent les factures maintenant.
Il faut accepter investir dans ce qui n'est pas rentable.
Au lieu de 500 Mds/an actuels pour les ENR, il faut passer a 2000 ou 3000Mds/an ,ce qui reste un faible pourcentage du PIB mondial. (100 000 Mds/an).
Cet effort suffit, ce n'est pas un effort démesuré.
Les actions individuelles et le libre marché non réglementé ne permettront pas le maintien du bien être humain. Une crise sociétale est plus a redouter qu’une crise écologique .
En face du libre marché, il faut une volonté , un état fort, soutenu par une majorité démocratique qui souhaite cet effort de transition et de taxation des plus riches.
En conclusion bien que les constats d’épuisement des ressources au sens large soient similaires , les perspectives des 2 auteurs ne le sont pas.
Arthur Keller envisage une action a échelle humaine, en petit groupe. il ne montre pas envisager une sortie par la politique alors que pour Jorgen Randers, la meilleure (l’unique) perspective est le niveau étatique et démocratique.
Chacun des 2 auteurs subit sa culture.
Arthur Keller est Français, où l’état a abandonné ses prérogatives au profit de la finances. Les gens se sentent dépossédés de tout pouvoir, livrés a eux même. Une action à échelle nationale ou supra nationale ne lui semble plus envisageable. Il ne le dit pas clairement, je le déduis de l’absence de ce propos.
Pour Jorgen Randers qui est scandinave, la notion d’état puissant et protecteur a surement encore du sens.
Au niveau des politiques Français, on retrouve cette notion de taxation des riches pour financer une transition écologique à la bonne echelle, chez Sandrine Rousseau et en substance chez Jean-Luc Melenchon.
Comme le dis Jorgen Randers à sa façon, laisser le système vivre sa vie (BAU+ actions individuelles) ne suffit pas. Il faut impulser une volonté collective radicale. Si cette impulsion démocratique et politique n’a pas lieu, c’est un effondrement social qui est a craindre. (chômage, émeutes, guerres, misère, barbarie)
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