P. Artus (Natixis) : "La prochaine crise sera extraordinairement violente"
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P. Artus (Natixis) : "La prochaine crise sera extraordinairement violente"
Le problème ne réside pas dans les systèmes, des plus libéraux au plus étatistes, mais dans la nature humaine. L'appât du gain, la lâcheté, le cynisme le plus abject sont toujours présents dans tous ces grands scandales financiers.
Dette: accord de principe entre l'Argentine et les fonds "vautours"
AFP le 29/02/2016
L'Argentine a accepté de payer la somme totale de 4,6 milliards de dollars aux fonds "vautours" pour mettre un terme à la longue bataille engagée après la faillite du pays en 2001, a annoncé lundi le médiateur en charge du dossier.
"C'est un pas de géant dans ce long contentieux mais ce n'est pas l'étape finale", a indiqué Daniel Pollack dans un communiqué, précisant que le Congrès argentin devait approuver l'accord et abroger une loi qui prohibait tout paiement des fonds vautours.
Depuis près de dix ans, les fonds NML et Aurelius menaient la bataille devant les tribunaux américains pour réclamer le remboursement intégral de titres de dette argentine rachetés à prix cassés après le défaut de paiement du pays en 2001.
La justice américaine leur avait donné raison en 2012 avant d'intensifier sa pression sur l'Argentine en lui interdisant de payer les créanciers plus conciliants ayant accepté une décote de 70% tant que ces fonds procéduriers n'avaient pas été remboursés.
Après des années de blocage, le nouveau gouvernement de centre-droit argentin a mis sur la table début février une offre de compromis prévoyant de rembourser 6,5 milliards de dollars sur les 9 milliards détenus par l'ensemble des fonds procéduriers.
Après plusieurs semaines d'intense négociation, l'Argentine est donc parvenue à trouver un accord avec les quatre fonds d'investissement -dont NML et Aurelius- qui faisaient de la résistance mais ont finalement accepté une décote de 25%.
Pour effectuer ce paiement, l'Argentine "envisage" de retourner sur les marchés financiers pour lever de l'argent, a indiqué le médiateur dans son communiqué.
Cet accord pourra également permettre à l'Argentine de reprendre le paiement de ses autres créanciers qui avaient accepté une décote plus importante de 70% lors de deux restructurations de dette en 2005 et 2010.
Les cinq ingrédients qui préparent la crise de 2020
Dix ans après la chute de Lehman Brothers en 2008, le risque d'une nouvelle déflagration est à nouveau élevé. Et, cette fois, les Etats surendettés ne disposent plus des mêmes armes pour y faire face.
Dix ans après l'effondrement de Lehman Brothers , des interrogations demeurent autour des causes et conséquences de la crise financière. Mais dans une perspective d'avenir, la question la plus pertinente consiste à déterminer ce qui provoquera la récession et la crise mondiale de demain.
Vers une récession mondiale
L'actuelle expansion mondiale devrait se poursuivre l'année prochaine, dans la mesure où les Etats-Unis enregistrent d'importants déficits budgétaires, où la Chine applique des politiques de crédit assouplies et où l'Europe reste sur une trajectoire de reprise. Mais d'ici à 2020, les conditions tendront vers une crise financière, suivie d'une récession mondiale. Plusieurs raisons expliquent cela.
Premièrement, les politiques de relance budgétaire qui poussent actuellement la croissance annuelle américaine au-dessus de son potentiel de 2 % ne sont pas tenables. D'ici à 2020, ladite relance se sera épuisée.
Inexorable hausse des taux d'intérêt
Deuxièmement, le timing de cette relance ayant été inadapté, l'économie américaine connaît actuellement une surchauffe, et l'inflation s'élève au-dessus de la cible. La Réserve fédérale des Etats-Unis devrait ainsi continuer d'augmenter le taux cible des fonds fédéraux, l'amenant de son niveau actuel de 2 % à 3,5 % au moins d'ici à 2020, ce qui élèvera probablement les taux d'intérêt à court et long terme, ainsi que le dollar américain.
Dans le même temps, l'inflation augmente également au sein d'autres économies majeures, tandis que le prix du pétrole contribue à des pressions inflationnistes supplémentaires. Cela signifie que les autres grandes banques centrales suivront la Fed sur la voie d'une normalisation de la politique monétaire, ce qui réduira la liquidité mondiale, tout en exerçant une pression à la hausse sur les taux d'intérêt.
Escalade commerciale
Troisièmement, les tensions commerciales opposant l'administration Trump à la Chine, à l'Europe, au Mexique, au Canada et à d'autres sont vouées à l'escalade, engendrant une croissance plus lente et une inflation plus élevée. La croissance dans le reste du monde devrait donc ralentir, sous l'effet de pays jugeant bon de riposter contre le protectionnisme américain. Les marchés émergents, d'ores et déjà fragilisés, continueront de subir les effets du protectionnisme et des conditions monétaires resserrées aux Etats-Unis.
Quatrièmement, l'Europe connaîtra, elle aussi, une croissance plus lente, en raison d'un resserrement monétaire et de frictions commerciales. Par ailleurs, les politiques populistes appliquées dans des pays comme l'Italie risquent d'engendrer une dynamique de dette intenable au sein de la zone euro . Dans ces conditions, une nouvelle récession mondiale pourrait conduire l'Italie et d'autres pays à quitter purement et simplement la zone euro.
Valorisations excessives
Cinquième point, les marchés boursiers américain et mondiaux sont en effervescence. Les ratios cours/bénéfice aux Etats-Unis sont supérieurs de 50 % à leur moyenne historique, les valorisations de capitaux privés sont devenues excessives et les obligations d'Etat trop coûteuses compte tenu de leur faible rendement et de leurs primes de terme négatives. Le crédit à haut rendement devient également de plus en plus coûteux, à l'heure où le taux d'endettement des entreprises américaines atteint des sommets historiques.
"La marge de relance budgétaire dans le monde est d'ores et déjà réduite."
Par ailleurs, l'endettement sur de nombreux marchés émergents et dans certaines économies développées se révèle clairement excessif. L'immobilier commercial et résidentiel est beaucoup trop coûteux dans de nombreuses régions du monde.
Marges de relance réduites
La marge de relance budgétaire dans le monde est d'ores et déjà réduite par une dette publique massive. La possibilité de nouvelles politiques monétaires non conventionnelles sera limitée par des bilans hypertrophiés, et par un manque de capacité à réduire les taux directeurs. Par ailleurs, les sauvetages dans le secteur financier seront intolérables pour des pays marqués par la résurgence de mouvements populistes, et dirigés par des gouvernements quasi insolvables.
Impuissance des banques centrales
Aux Etats-Unis, en particulier, le législateur a limité la capacité de la Fed à fournir de la liquidité aux institutions financières non bancaires et étrangères présentant des passifs libellés en dollars. En Europe, la montée des partis populistes complique l'adoption de réformes au niveau de l'UE, ainsi que la création des institutions nécessaires pour combattre la prochaine crise financière et la récession qui s'ensuivra.
A la différence de 2008, époque à laquelle les gouvernements disposaient des outils politiques permettant d'empêcher une chute libre, les dirigeants qui affronteront la prochaine récession auront les mains liées, sachant par ailleurs que les niveaux globaux de dette sont supérieurs à ceux d'avant-crise. Lorsqu'elles surviendront, la crise et la récession de demain pourraient se révéler encore plus sévères et prolongées que celles d'hier.
Nouriel Roubini est le président de Roubini Global Economics. Ce texte est publié en collaboration avec Project Syndicate 2018.
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