Christophe a écrit :Une technique antique mais remise à la mode par une jeune entreprise pour économiser l'eau et qui serait peut être intéressant de combiner avec le potager du paresseux en ces temps de canicule et manque d'eau...qu'en pensent les spécialistes?
Ce qui est sûr, c'est que cela commence par vous faire perdre de l'argent !!! Il vaut combien ce machin, par rapport à ce que c'est (un pot) ???
1) Je n'aime pas ces arguments "racoleurs"...
2) Pourquoi quelque chose de "sioux" serait forcément ou "antique" ou "exotique" ????
Il faut faire "croire". Et tout le monde sait que le monde antique était merveilleux, que les tribus exotiques sont parfaites et naturellement écolo (c'est sûr, les centrales nucléaires et les moteurs TDI truqués, c'est pas leur fort !)...
Donc, quand je vois ça, je n'ai même pas envie d'aller plus loin !
Sur le fond :
a) Une plante a un certain "besoin en eau", qui dépend de la demande climatique : température, hygrométrie, vitesse du vent essentiellement (et d'autres facteurs : fertilité du sol, stade du cycle de la plante)...
b) à partir de là, de deux choses l'une :
- ou ce besoin est satisfait, et la plante ne stresse pas ; elle laisse ses stomates ouverts ; les échanges gazeux sont max, la photosynthèse optimale, le rendement, la croissance élevés...
- ou la plante ne trouve pas la quantité d'eau ; elle réduit ses pertes pour ne pas dessécher et par là, ses échanges gazeux ; sa croissance diminue... Et si elle n'y arrive pas, elle flétrit et peut mourir.
Donc tout va dépendre avec quelle facilité la plante trouve l'eau !
Donc de son système racinaire et le volume qu'il explore d'une part...
Et bien entendu de la quantité d'eau dans le sol d'autre part : plus le sol est sec, et plus il retient fortement l'eau... Les plantes ont une force de succion (l'inverse d'une pression) de l'ordre de grandeur de 15 bars.
c) Alors les jarres poreuses, là-dedans ????
- Elles ne modifient en rien le mécanisme physiologique
- Elles concentrent l'eau en 1 point... Donc oui, la plante consommera moins, car les 3/4 de ses racines sont ailleurs ! Cela ne veut pas dire qu'elle ne stresse pas !
- En gardant la surface du sol sèche, elles évitent les pertes de surface... C'est le seul avantage. Il n'est pas nul.
Donc si on verse le contenu d'une jarre en surface du sol, c'est clair qu'une partie de l'eau va s'écouler, les 3/4 vont mouiller les premiers cm à la ronde puis se dépêcher de s'évaporer. De ce point de vue, "enterrer" l'eau l'économise. Ou plus exactement, la part d'eau apportée parvenant aux racines augmente, c'est sûr.
d) Mais le "Potager du Paresseux" est beaucoup plus sioux que cela et n'a pas besoin de claquer du fric pour de tels artifices :
- le sol est enrichi en matières organiques, qui sont des éponges naturelles
- il est couvert en permanence, ce qui freine fortement les évaporations ; le foin est archi-sec en surface en ce moment ; la jarre ne fait pas mieux !
- surtout, on y cultive les champignons (pas les chapeaux, les filaments dans le sol appelées hyphes, 10 fois plus fin que les cheveux) ; et les champignons, c'est miraculeux : avec la même quantité de biomasse, ils explorent 100 fois plus de volume de terre que les poils absorbants des plantes ; ils vont dans les fissures restées humides ; leur force d’extraction est de l'ordre de 90 bars, donc ils sont plus efficaces que les plantes pour extraire l'eau ; ils s'associent aux racines des végétaux pour former des mycorhizes, où plantes et champignons échangent ce qu'ils ont (les plantes, les sucres issus de la photosynthèse sans lesquels le champignon ne peut vivre ; les champignons, minéraux et eau)...
- s'il le faut (mais mis à part ma serre, je n'arrose toujours pas ! La vidéo tournée hier est en train d'être uploadée), j'utilise du goutte-à-goutte (sauf pour les semis) : il se forme sous terre un "bulbe" humide s'apparentant à ces jarres enterrées, sauf qu'il n'y a pas de parois, inutiles ; la terre constitue naturellement le réservoir - il suffit de doser les apports ; le goutteur étant placé au pied de la plante, le volume exploré par racines et mycorhizes et le volume de ce "bulbe" de terre humide se superposent au lieu d'être l'un à coté de l'autre... Cela vaut quelques euros les 10 !
Donc je pense que ce "truc" est parfaitement inutile ou nul dans un Potager du Paresseux. Mais cela passe à la télé, que veux-tu...Il y a encore des gens qui, à l'ère Hanouna, pensent que si ça passe à la télé, c'est que c'est vrai ! Et puis il y a ceux qui ont perpétuellement besoin de croire en des solutions miraculeuses, comme je l'ai dit, "antiques" ou "aztèques". Le mythe rousseauiste du "bon sauvage" (ou du "bon primitif", celui qui tirait sa femme par les cheveux...)...
Mais ceci n'est que mon opinion.