Le Principe de Lucifer

[sen-no-sen]

Un livre dont je conseil vivement la lecture:Le Principe de Lucifer de Howard Bloom

Les mèmes mènent l'histoire

Le Principe de Lucifer (The Lucifer Principle), livre au titre insolite, lui vaut de se retrouver dans le rayon "ésotérisme" du magasin Virgin, trônant au milieu de traités de méditation transcendantale, du énième "secret des pyramides" ou autres "Mystères de Rennes-le-Château"… !
Dans ces conditions, on se demande qui pourra bien le lire : les ésotéristes n'en voudront certainement pas, les politologues ou analystes politiques n'auront jamais l'idée d'aller le chercher dans ce type de rayon. Décidément, ce Lucifer a le génie de la dissimulation.

Il s'agit pourtant d'un livre fondamental, voire fondateur. Il est en effet à la mémétique(1) ce que fut en son temps à la mimétique le livre de René Girard "Des choses cachées depuis la fondation du monde", éditions Grasset, 1978).

Le Principe de Lucifer est un ouvrage déroutant, à la fois très scientifique dans son approche (très nombreuses références) mais aussi plein d'humour, voire d'espièglerie… Les raccourcis sont saisissants, la densité extrême, les intuitions fulgurantes, les raisonnements implacables, le champ de connaissance immense.
L'étrange personnalité de l'auteur, son style et son comportement parfois primesautier mais toujours très rigoureux lui valent les éloges d'une large partie de la communauté universitaire américaine de Stanford à Harvard, en passant par UCLA et l'université John Hopkins. La très officieuse revue, Foreign Affairs, lui rend également un hommage appuyé. Mais ce n'est pas tout : Le principe de Lucifer est devenu le livre culte des groupes de rock de Broocklyn qui "samplent" des passages entiers de son livre pour l'intégrer dans leur musique… !
Si l'auteur est universitaire, signalons que ce livre a été refusé par trente-deux éditeurs new-yorkais avant d'être finalement publié.

"Nous avons besoin de l'histoire dans son intégralité, mais pas pour retomber dedans mais pour lui échapper " : cette citation d'Ortega Y Gasset placée en début d'ouvrage, vient comme un avertissement de l'auteur, conscient des hypothèses dévastatrices qu'il développe, voire de leur aspect désespérant. Et Bloom d'ajouter : " Les systèmes que je vais décrire ne sont pas mon idée de ce que devrait être le monde, ils sont les conclusions auxquelles j'ai abouti à regret, concernant ce qu'il est vraiment. ". "Il traite de la façon dont, par notre intérêt pour le sexe, notre soumission à des dieux et à des dirigeants, notre attachement parfois suicidaire à des idées, des religions et de vulgaires détails de type culturel, nous devenons les instigateurs inconscients des exploits de l'organisme social."

http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2002/fev/principe.html

[Ahmed]

J'ai été globalement déçu de la lecture du bouquin de Bloom (ce qui ne veut pas dire que j'en déconseille la lecture!).
Son principal défaut me semble être un goût immodéré pour la dilution, ce qui le conduit à des longueurs pénibles...
Quand je pense qu'il a (ou va) commis deux volumes supplémentaires comme suites à ce premier ouvrage...
C'est d'autant plus dommage que cela s'oppose à une vision synthétique qui peine à émerger de la masse d'un corpus qui n'est pas sans intérêt...

[sen-no-sen]

C'est sur que Bloom n'est pas Roddier dans la concision ,mais les idées qu'il développe sont particulièrement novatrice et bien que sa vision atlantiste soit fatiguante,il en reste un ouvrage avec un "avant et un après".

Il me semble que l'on peut compter sur les doigts d'une seule main le nombre d'auteurs ayant développé l'idée de super-organisme pour décrire le fonctionnement de la société humaine.

[Ahmed]

Ce n'est pas si étonnant que ce soit un américain: il semble que ce soit une certaine constance chez eux, que de s'employer à bétonner toute grille explicative.
Je trouve plus intéressants les propos de René Girard, dans leurs limitations et leurs côtés inachevés qui laisse une place au lecteur...
Comptes-tu Marx parmi ceux faisant référence à un super-organisme?

[sen-no-sen]

Pour Marx j'avoue que non.
Je garde un certain respect pour Howard bloom car sans lui je n'aurais pas connu certain auteurs comme Susan Blackmore ou Jean-Paul Baquiast par exemple qui développe des idées très novatrices égalements.
J'ai découvert H.Bloom par les écrits de F.Roddier,qui connais bien J-P Baquiast etc!...le monde est petit!

[sen-no-sen]

Un exposé TEDx de Susan Blackmore sur les mèmes,concept largement exposé par H.Bloom.

"Susan Blackmore étudie les mèmes: des idées qui se reproduisent de cerveau en cerveau comme un virus. Elle fait une proposition étonnante: l'humanité a donné naissance à un nouveau genre de mème, les tèmes, qui se reproduisent par la technologie - et inventent de nouvelles manières de survivre."
https://www.ted.com/talks/susan_blackmore_on_memes_and_temes?language=fr

(les sous titres sont à sélectionné dans le lecteur.)

L'idée développé par S.Blackmore est révolutionnaire et fait froid dans le dos:
Si la première révolution évolutive fut le gène,l'arrivé d'un second réplicateur a permis à nos ancêtres primates de nos propulsé au stade d’hominidés,mais cette évolution n'est pas terminé.
En effet avec le développement technologique amorcé il y a plus de 5000 ans avec l'apparition des civilisations,l'espèce humaine est entré dans l'ère de l'antropocène (il y a moins de 200 ans )avec la révolution industrielle.
Celle ci a finalement "accouché" d'un nouveau réplicateur:le tème (diminutif de techno-mème).
Les tèmes sont des mèmes technologique qui se répliquent de façon exponentiel à travers l'utilisation amplifiante de la technologie.

La ou cela devient intéressant(et terrifiant!) c'est qu'en réalité,l'effondrement écologique que nous traversons n'est absolument pas un triste accident mais la suite normale(sic!) visant a éradiquer les formes de vie non-adaptée au prochain saut évolutif.
Ainsi le réchauffement climatique,la chute de la biodiversité,l'acidification des océans ne serait qu'un processus logique pour la nouvelle ère,que l'on pourrait appelé technocène.
Selon cette logique nous somme donc condamné à disparaitre...

[phil53]

Selon cette logique nous somme donc condamné à disparaitre...

C'est logique et même quand on y pense, rien n'est infini.
La grosse différence c'est que c'est l'homme lui même qui accélère son extinction.
C'est quand même différent de tout ce qui est arrivé avant.

[dede2002]

Effectivement la génération précédente apprenait de ses parents, alors que maintenant, question utilisation des appareils modernes, c'est les parents qui demandent aux enfants comment faire...

Est-ce les tèmes qui remplacent les mèmes?

[sen-no-sen]

Effectivement la génération précédente apprenait de ses parents, alors que maintenant, question utilisation des appareils modernes, c'est les parents qui demandent aux enfants comment faire...

Est-ce les tèmes qui remplacent les mèmes?

D'une certaine façon,et toute proportion gardée les mèmes culturelle traditionnelle tendent à laisser leurs place aux tèmes.
D'ailleurs la majeur partie de l'enseignement professionnel est désormais quasi exclusivement attribué a ses derniers.
Le danger c'est que l'évolution technologique est bien trop rapide pour nous,et que si l'on n'y prend pas garde nous devrons opérer une mise a jour sur nos corps de primate ,par le biais de manipulation génétique ou d'implants neurologique,afin de pouvoir suivre la course en avant qui s'impose désormais à nous( et que nous nous somme imposé).


phil53 a écrit:

La grosse différence c'est que c'est l'homme lui même qui accélère son extinction.
C'est quand même différent de tout ce qui est arrivé avant.

Ce processus n'est pas nouveau,il porte d'ailleurs un nom:l'effet de la reine rouge(en référence a Alice au pays des merveilles,à l'épisode ou Alice et la Reine rouge se mettent à "courir sur place" pour ne pas être emporté....)
Plus une société (mais cela est vrai pour toutes les espèces!) dissipe de l'énergie,plus celle ci modifie sont environnement,et plus sont environnement est modifié,plus elle dois se réadapter...en dissipant toujours plus d'énergie,ce qui accélère le processus évolutif.

C'est pour cette raison que la politique de la croissance économique telle qu'elle est recherché par nos "élites" est une course au suicide,plus nous recherchons la croissance et plus celle ci détériore les conditions(écologique,sociale) de notre planète,nous forçant alors a opérer toujours plus de mesures invasives.
L'exemple de la récente loi Macron expose bien se fait.

[GuyGadebois]

La mémétique peut se résumer en une phrase:
"On prend les mèmes, et on recommence".
Méditez là dessus.