Alors que la flambée du prix du pétrole relance le débat sur le développement des énergies renouvelables, le gouvernement français vient d’annoncer son » plan biocarburants « , qui doit entrer en vigueur début 2005. Les professionnels de ces filières n’ont cependant pas obtenu les mesures fiscales et réglementaires qu’ils demandaient.
Le prix du baril pétrole , qui est monté jusqu’à 45 dollars au cours du mois d’août, n’aura peut-être pas d’effet direct sur les investissements dans des énergies renouvelables, mais il aura au moins permis de rappeler la situation de dépendance énergétique dans laquelle se trouvent la plupart des pays occidentaux. L’épuisement des gisements de la mer du Nord, du Canada et du Mexique risquent en outre d’aggraver cette situation de dépendance au pétrole, qui, à terme proviendra essentiellement de zones instables au plan géopolitique -Moyen-Orient, Caucase, Asie centrale et golfe de Guinée-. Ces deux facteurs conjugués pourraient engendrer de nouvelles flambées des prix dans les 50 prochaines années, et même les pays comme la France, qui ont choisi l’option nucléaire, seraient affectés. D’où le rôle important que peuvent jouer les énergies renouvelables, qui restent actuellement limitées à 10% de la consommation d’énergie en Europe, mais qui devraient atteindre 21% d’ici 2010 selon la réglementation en vigueur. Les biocarburants – éthanol, méthanol et biodiesel- devraient quand à eux passer de 2% en 2005 à 5,75% en 2010. En France, ils ne sont incorporés actuellement qu’à hauteur de 1 % dans l’essence et le gazole, malgré 180 millions d’euros d’incitations fiscales par an. Les professionnels de ces filières attendent avec une certaine impatience d’autres mesures fiscales et réglementaires, mais le gouvernement est resté muet sur cette question. Le 19 août, le président Chirac a lui-même souligné » la très grande importance qu’il attache au développement des bioénergies pour des raisons agricoles, environnementales et énergétiques » et a demandé au gouvernement » d’accélérer le développement et la diffusion des biocarburants » par des mesures appliquées » dès le 1er janvier prochain « .
Avantages écologiques et économiques
Les avantages des bioénergies sont à la fois économiques et écologiques. Dans des pays tels que les Etats-Unis ou le Brésil, qui augmentent leurs capacités de production de près de 30% par an, elles permettent d’économiser chaque année 1,1 million de tonnes de pétrole, soit environ 2,5 à 3 milliards d’euros, tandis qu’elles évitent également l’émission de 16 millions de tonnes de dioxyde de carbone… Les transports étant la principale source de rejets polluants dans l’air (il représentent 50% de la consommation totale de pétrole) , on comprend l’enjeu qui consiste désormais à rendre compétitive la production des biocarburants par rapport à celle des combustibles fossiles. » Il est urgent que le gouvernement prenne ses dispositions, sinon la France prendra du retard, souligne Pierre Cuypers, président de président de l’Association pour le développement des carburants agricoles (Adeca) et du Comité européen des biocarburants . Quand il faut un mois aux Etats-Unis pour construire une unité de production d’un million de tonnes de bioéthanol, c’est deux ans qui sont nécessaires en France « . Les acteurs de la filière demandent donc un cadre fiscal et réglementaire pour parvenir à doubler le taux de biocarburant incorporé dans l’essence et le gazole, consistant notamment à » récompenser les bons élèves et taxer ceux qui n’incorporent pas de biocarburants « . D’autant que les pays de l’Union européenne disposent des ressources agricoles -oléagineux, maïs- nécessaires à la production des biocarburants pour répondre aux besoins d’ici 2010. Près de 120 000 emplois pourraient en outre être crées par le développement de cette filière, selon les organisations professionnelles.
Véronique Smée
Source : http://www.novethic.fr/novethic/site/article/index.jsp?id=80288