Ces dernières années, les épisodes de canicule connaissent une constante augmentation. Cet été 2022 ne fait pas exception, avec des températures dépassant les 40 degrés dans certaines villes de France. D’ici 2050, certaines régions du monde pourraient devenir inhabitables, c’est le cas par exemple de l’Asie du Sud, du Golfe Persique ainsi que de plusieurs pays du bord de la mer rouge. Ailleurs dans le monde, en parallèle de l’augmentation globale de la chaleur, des épisodes de canicule pourraient aussi devenir plus nombreux dans la plupart des grandes villes. La France n’y échappera pas, alors comment se protéger au mieux de ces vagues de fortes chaleurs ?
Quels sont les principaux intérêts de la végétalisation urbaine ?
Une canicule se définit comme étant une période de fortes chaleurs de jour comme de nuit, d’une durée minimum de trois jours consécutifs. Les températures à atteindre pour pouvoir parler de canicule varient selon les régions.
Source : Le Monde : A partir de quelles températures peut-on parler de canicule dans chaque département ? (cliquer pour voir la carte interactive)
En France, un classement du Figaro établit les villes qui pourraient être le plus touchées par l’augmentation des épisodes de canicules d’ici 2040. On y retrouve Annecy, Lyon et Saint-Étienne sur le podium. Mais d’autres villes, notamment dans le Grand-est (Dijon, Nancy, Strasbourg,…) y sont aussi représentées. Or ce sont dans les grandes villes que les vagues de chaleur sont les plus difficiles à vivre. Chaque année, elles sont responsables d’une augmentation des hospitalisations et de problèmes de santé pouvant aller jusqu’au décès.
En effet, en ville, il a tendance à faire plus chaud la journée, et cette chaleur ne parvient pas correctement à s’évacuer la nuit. Ce phénomène appelé « îlots de chaleur » possède plusieurs causes qui s’accumulent. Tout d’abord, les matériaux de constructions en ville (asphalte, béton, pierre, ciment) ont tendance à retenir la chaleur. Les couleurs claires, contribuant à réfléchir les rayons du soleil sont encore assez rares dans nos pays occidentaux. Il arrive aussi que la chaleur soit piégées dans les rues étroites de nos agglomérations. Enfin l’utilisation de la climatisation contribue à l’augmentation de la température urbaine. Ce phénomène est expliqué dans les deux vidéos suivantes :
Pour mieux vivre ces épisodes de fortes chaleurs, une solution a fait ses preuves : la végétalisation !! Les plantes absorbent rayons lumineux et matières organiques (notamment le CO2) qu’elles transforment en énergie leur permettant de pousser : c’est la photosynthèse. D’autre part elles absorbent de l’eau dans le sol à l’aide de leurs racines. Cette eau s’évapore ensuite sous forme de micro-gouttelettes qui contribuent à refroidir l’air ambiant : c’est l’évapotranspiration. Amener des végétaux dans nos villes permettrait donc de contribuer à y faire baisser la température, tout en procurant également des zones d’ombres, essentielles en cas de fortes chaleurs. Voyons ensemble différents exemples permettant de rendre nos villes plus vertes.
Planter des arbres
Quand on parle de végétation, difficile de ne pas penser aux arbres !! En effet, ces végétaux, certes imposants, sont aussi ceux qui sont les plus efficaces pour contribuer à faire baisser la température. En plus de la photosynthèse qui leur permet d’absorber une partie des rayons du soleil, leur densité permet également de bloquer une partie des rayons lumineux et la température sous une couverture arborée serait en moyenne 4° plus basse qu’en zone non couverte. L’évapotranspiration leur permet également de rejeter jusqu’à 300L d’eau par jour. Ainsi il est assez fréquent de voir se former une couverture nuageuse en zone forestière. En ville aussi, ce rejet d’eau peut participer à la régulation de la température. Ci dessous, les allées boisées et ombragées de différents parcs de la ville de Reims.
Cependant, pour être efficace, la plantation doit être réfléchie !! Dans un premier temps, il s’agit d’identifier des espèces adaptées au climat de la zone dans laquelle on souhaite les planter. Certains arbres, tels que les sapins ou les épicéas, sont beaucoup plantés à cause de leur croissance rapide. Cependant, ces espèces sont impactées par le réchauffement climatique, souffrant de manques d’eau ou d’invasions d’insectes (scolytes, chenilles processionnaires, …). Ce ne sont donc pas forcément de bons choix à long terme. A l’inverse, certains arbres comme le chêne vert, se révèlent particulièrement bien adaptés à la vie urbaine, tout en étant efficaces pour absorber la pollution. La ville de Metz a mis en ligne une série de 85 fiches reprenant les principales espèces d’arbres locaux. Une série de critères y sont repris et notés pour aider à déterminer les espèces les plus intéressantes à planter en milieu urbain.
Une fois le type d’arbre choisi, il faut aussi trouver la bonne localisation pour la plantation. En effet, pour pouvoir profiter des effets de l’évapotranspiration il faut que l’arbre reçoive une quantité d’eau suffisante. Il faudra donc veiller à laisser une surface au sol non bitumée assez conséquente à son pied pour que l’eau puisse s’y infiltrer, ou réfléchir à un système de redirection des eaux de pluies pour qu’elles puissent profiter convenablement à l’arbre pour sa croissance.
Ici, cet arbre profitera difficilement de l’eau de pluie qui lui serait pourtant nécessaire.
Parfois il peut être compliqué de trouver de la place pour planter des arbres, des solutions peuvent cependant être imaginées :
- plantations d’arbres sur les parkings de supermarchés, permettant la création de zones d’ombres pour se garer
- plantation d’arbres aux abords des pistes cyclables
- plantation d’arbres dans les cours d’écoles, les universités ou dans certaines entreprises, en collaboration avec les personnes étudiant ou travaillant sur place
Dans les cas où la place ne permet pas la plantation d’arbres, d’autres initiatives, détaillées plus loin dans l’article, peuvent être intéressantes à mettre en place.
Préserver la biodiversité
La végétalisation urbaine est devenue essentielle à la préservation de la biodiversité. En effet, les terres agricoles, bien souvent contaminées par les pesticides, ne sont plus hospitalières pour les insectes dont les populations diminuent d’année en année. Or les butineurs et autres insectes sont essentiels à la production de nourriture humaine. Pour les aider à survivre dans nos villes, quelques gestes très simple peuvent être mis en place. Ainsi une ville fleurie leur procurera de la nourriture en suffisance. Il peut donc tout simplement s’agir de ne plus arracher les fleurs sauvages qui poussent naturellement au milieu de nos pelouses.
Il est aussi possible de semer des mélanges de fleurs des champs qui donneront une touche de couleur aux espaces verts ou au sein de jardins partagés. La mise en place de ces jardins participatifs permet également d’amener de la vie dans les quartiers. Il est aussi possible de fabriquer des abris pour insectes qui pourront y être mis en place. Ce type d’activités peut aisément être réalisé en collaboration avec écoles et centres de vacances. Les insectes, s’ils sont présents en bonne quantité, attireront aussi des oiseaux tels que les hirondelles.
Enfin, il peut être intéressant de remplacer la tonte des espaces verts par un fauchage tardif. Ce dernier possède de nombreux avantages :
- une fauche, même mécanique, laisse échapper 70% des insectes présents dans l’herbe
- une première fauche mis mai permet de ne pas couper les fleurs qui constituent la première nourriture des abeilles, bourdons et autres insectes
- une fois fauchée, l’herbe peut être mise au composte ou utilisée pour paillage dans une démarche de permaculture.
Retarder la fauche de l’herbe lui permet de rester verte plus longtemps. Il peut être intéressant de conserver des zones non fauchées dans certains espaces verts. C’est par exemple ce que fait la ville de Charleville dans plusieurs de ses parcs avec la mise en place de « zones de biodiversité » :
Toitures et façades végétalisées
Végétaliser peut vite prendre de la place. Il peut donc être intéressant d’utiliser à cet effet des surfaces n’ayant pas d’autre possibilité d’usage. C’est par exemple le cas du toit de nos habitations !! Qu’ils s’agissent d’un toit plat ou d’un toit en pente, avec quelques aménagements, il vous sera possible d’y faire pousser mousses dépolluantes, et végétaux résistants au soleil. Ce type de toiture a l’avantage de constituer une isolation efficace aussi bien contre les fortes chaleurs en été, que contre le froid en hiver.
Une fois en place, la toiture végétalisée participera de plusieurs manière à la lutte contre le réchauffement climatique. Il sera en effet possible d’y installer des mousses, dépourvues de racines, donc absorbant efficacement le CO2 et les particules fines. Mais aussi des plantes (grasses essentiellement), qui participeront à l’évapotranspiration. Enfin, la couche de substrat nécessaire à la survie des plantes sera d’une aide précieuse pour la rétention des eaux pluviales.
Les façades peuvent aussi être végétalisées. Cela a fait l’objet d’un article sur les murs végétaux.
Abris bus et bus végétalisés
Dans la même idée de végétalisation des espaces inemployés, il est possible de planter directement sur le toit des abris-bus présents dans toutes nos villes française. Cette végétalisation est cependant assez couteuse (environ 1000 euros par abri-bus), ce qui explique sans doute qu’elle ne soit pas encore très répandue en France. Cependant l’offre commence tout de même à se constituer. La société JCDecaux propose par exemple plusieurs modèles d’abri-bus végétalisés. Un abri dépolluant, dont le toit est simplement recouvert de mousse. Un abri avec toiture végétalisée/fleurie. Et enfin, un abri avec parois végétalisées. L’ajout d’un système de filtration de l’air à travers la toiture végétalisée peut également permettre de purifier et de rafraichir l’air respiré par les voyageurs.
En Espagne, ou encore à Singapour, ce sont directement les toits des bus qui ont fait l’objet d’une végétalisation !! Cette solution ayant l’avantage d’être esthétique, créant de véritable jardins ambulants, mais aussi celui de réduire la température à l’intérieur des bus en été. Là encore, le tarif est par contre un frein puisqu’il faut compter environ 2500 euros par bus à végétaliser.
Pour aller plus loin…
Les initiatives pour rendre nos villes plus vertes ne sont pas exclusivement réservées aux municipalités. Ainsi chacun peut choisir de planter dans son jardin ou même sur sa terrasse ou son balcon !! Dans un terrain ou un jardin de bonne taille, il peut être intéressant de planter quelques arbres fruitiers qui fourniront de la nourriture, un arbre parasol sous lequel installer une table au frais, ou tout arbre/buisson fleuri qui fera le bonheur des insectes. Du côté des balcons, la plantation à la verticale peut parfois permettre un gain de place considérable. Il est possible de semer de nombreuses variétés dont une bonnes parties de plantes comestibles. Attention toutefois de rester dans le cadre de ce qui est autorisé par la ville, et le propriétaire de l’immeuble. Les jardinières placées vers l’extérieur des balustrades sont souvent proscrites pour des raisons de sécurité assez évidentes. La vidéo suivante présente un exemple de végétalisation sur un balcon :
Certaines villes ont mis en place des « permis de végétaliser », permettant aux habitants de cultiver certaines zones urbaines librement. Cependant, pour être efficace, cette initiative doit être suivie et entretenue par les habitants. Certaines villes, comme celle de Paris, ont fini par faire marche arrière à cause d’installations non entretenues qui avaient alors l’effet inverse de celui attendu.
La végétalisation en ville peut également s’accompagner de la mise en place d’autres aménagements tels que des jeux ou parcours sportifs. L’idéal étant alors de les réaliser à l’aide de matériaux respectueux de l’environnement. Ici un parcours pédagogique réalisé en bois dans le Parc de la Patte d’Oie à Reims :