Réchauffement climatique :
les vignerons s'inquiètent
Delphine Chayet
13/08/2009 | Mise à jour : 09:17 | Ajouter à ma sélection
Selon ces professionnels, le goût du vin a déjà changé et l'augmentation des températures modifiera les cépages traditionnels.
Ils sont cinquante vignerons, chefs cuisiniers, œnologues ou sommeliers et, à ce titre, ardents défenseurs des terroirs français. Leurs signatures figurent au bas d'un «appel solennel» lancé au président de la République et au ministre de l'Environnement, à quelques mois de la conférence de Copenhague sur le climat. «Le réchauffement climatique rend les vignes de plus en plus vulnérables, écrivent-ils dans cette tribune du Monde. Fleurons de notre patrimoine culturel, les vins français, élégants et raffinés, sont aujourd'hui en danger.»
Selon ces professionnels, le goût du vin a déjà commencé à changer. Les dates de vendanges ont régulièrement été avancées, ces trente dernières années, et le soleil charge les raisins en sucre. «Le réchauffement donne des vins plus épicés et riches, avec des teneurs en alcool plus marquées, souligne le sommelier Franck Thomas. Ce sont des vins moins digestes, moins fins et moins agréables à boire au quotidien.» Avec l'augmentation des températures, ce phénomène est amené à s'accentuer. À long terme, la carte des vins français se trouvera profondément modifiée. Les appellations d'origine contrôlées seront bouleversées.
Des vignes en Bretagne
«Dans quarante ou cinquante ans, le pinot noir ou le riesling tels qu'ils sont faits aujourd'hui en Bourgogne et en Alsace auront par exemple disparu», prédit Franck Thomas. À cette date, de nouvelles régions viticoles pourraient voir le jour en Bretagne et en Normandie, mais aussi en Angleterre. «Si rien n'est fait pour réduire les gaz à effet de serre, les vignes se déplaceront de 1 000 km au-delà de leurs limites traditionnelles d'ici à la fin du siècle », prévient en effet Anaïz Parfait, de Greenpeace. Selon Jean-Pierre Chabin, géographe à l'université de Bourgogne, «on peut penser qu'il y aura des vignes dans le sud de la Suède et en Écosse».
Mais pour Jean-Philippe Bret, producteur au domaine de la Soufrandière, en Bourgogne du sud, «ce qui fait la spécificité d'un vin de terroir, ce n'est pas seulement le climat, mais aussi des sols, une exposition et un savoir-faire. Parce que cette conjonction est impossible à retrouver ailleurs, o n ne fera jamais de Bourgogne ailleurs qu'en Bourgogne».
C'est pour éviter ce scénario que le chef Marc Veyrat, le sommelier Antoine Petrus et les domaines Zind Humbrecht en Alsace et Selosse en Champagne ont joint leurs noms à l'appel. Tous espèrent la signature à Copenhague d'un «accord ambitieux», «engageant les pays industrialisés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40 % d'ici à 2020».
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